Le réalisateur-caméraman est carrément tombé en amour avec le continent africain dans ses voyages comme documentariste indépendant. Malgré la beauté des images, son nouveau documentaire Rwanda, le paradis retrouvé!, n’est pas un film touristique.
« C’est un pays qui est passé du pire au meilleur. Il y a 25 ans, c’était l’un des pays les plus dangereux du monde, dit-il en référence au génocide des Tutsi. Aujourd’hui, c’est un exemple à suivre. Les Rwandais auraient pu se tourner vers la vengeance. Et si le réflexe avait été la vengeance, le peuple serait encore là-dedans aujourd’hui. Là, sans nécessairement tout pardonner, le peuple s’est réconcilié. C’est difficile de le concevoir. »
Même s’il est obligé d’en parler, son film n’est pas centré sur la politique, mais plutôt sur ce peuple qui a décidé de reconstruire, d’être visionnaire.
De son amour du pays, il en retient un endroit où la place des femmes au gouvernement est importante, où la société se concentre sur son environnement et qui se démarque en offrant l’assurance maladie à tous ses citoyens et qui compte le plus haut taux de scolarité de tous les pays émergents.
Il retient surtout des exemples de pardon, de clémence et de compassion dont les Rwandais ont fait leur marque de commerce.
Après trois voyages au Rwanda pour filmer ses images, Charles Domingue a réussi à tisser de nombreux liens avec des locaux. En entrevue, il peut relater de nombreuses rencontres ou anecdotes. Il parle de son ami conducteur, qui s’est réconcilié avec le tueur de sa famille. Ou encore cette dame qui a caché une enfant aux yeux mêmes de sa famille pour la sauver. M. Domingue a eu l’occasion de voir leurs retrouvailles émotives. « C’est une vraie héroïne, cette femme, et personne dans son village ne le savait. » Ou encore ce vétérinaire qui a reconstruit et repeuplé un immense parc animalier. Ce sont toutes des histoires humaines, racontées à travers le prisme de plusieurs thèmes, comme l’altruisme, la bienveillance ou la résilience.
« Comme les autres films, ce documentaire a changé ma vie, raconte le globe-trotteur. Je trouve nos petites chicanes ridicules. Certains réussissent à pardonner à ceux qui ont tué toute leur famille. Faut apprendre à se parler, chercher des solutions. C’est pour ça que j’aime l’Afrique; ils ont la vie dure. Un enfant serait prêt à se faire couper un bras pour aller à l’école. On ne se rend pas compte de notre chance. Nous avons gagné la loterie du confort, mais pas du bonheur. »
En conclusion d’entrevue, Charles Domingue raconte cette anecdote concernant le chanteur Patrick Norman. Un jour, le chanteur est attablé dans un restaurant de Montréal. Une dame s’approche de lui. Son nom est Marie-Josée Gicali, écrivaine et survivante du génocide rwandais. Timidement, presque en chuchotant, elle s’adresse à M. Norman pour lui expliquer que sa musique lui a sauvé la vie et lui a redonné espoir pendant qu’elle était terrée sous son lit alors que sa famille était assassinée. « Je chantais dans ma tête les paroles de votre chanson : “Le cœur devient moins lourd, quand on est en amour” », a-t-elle raconté au chanteur country.
M. Norman ignorait que la chanson était populaire au Rwanda. « Je les ai réunis pour le film. M. Norman a l’occasion de sortir sa guitare en compagnie de Mme Gicali pour une finale toute en émotion », conclut le réalisateur.