C’est avec une pointe d’amertume que le Grand Chevalier Claude Lebrun a confirmé le changement à venir, qui s’opère en concertation avec les trois municipalités touchées. Cette décision s’explique notamment par une absence de relève, le vieillissement des bénévoles et la « gestion lourde » qu’implique un tel service. Mais c’est surtout la duplication des services sur le territoire qui a poussé les Chevaliers de Colomb à prendre leur décision de se retirer pour que la « vampirisation des ressources » cesse entre les différents organismes qui cognent aux mêmes portes pour obtenir de l’argent et des denrées.
« Je pense qu’on a donné tout ce qu’on a pu avec le comptoir alimentaire. C’est sûr que ça nous fait un pincement au cœur de le fermer, mais on tourne la page et on va continuer de s’impliquer dans d’autres dossiers », soutient Claude Lebrun. Son seul souhait est que les bénéficiaires de leur comptoir ne tombent pas entre deux chaises et puissent continuer de recevoir du dépannage alimentaire sans interruption.
Transition en douceur
Doris Hamelin, directrice générale du Grain d’Sel, n’a pour sa part aucune crainte que la passation du flambeau se fera bien et estime que son organisme pourra pleinement s’occuper de la clientèle du comptoir des Chevaliers de Colomb à partir de cet automne. « Il y a déjà eu quelques rencontres avec les Chevaliers de Colomb et les trois villes concernées et on a prévenu qu’on serait fin prêt pour accueillir les familles supplémentaires à compter de septembre. » Pour éviter l’afflux de dizaines de nouveaux demandeurs d’un seul coup, les gens seront graduellement invités à passer d’un comptoir à l’autre. « L’idée est de ne pas voir arriver 40 nouvelles familles d’un seul coup, le mot d’ordre est de faire une migration lente, en douceur entre les deux services. » Selon Doris Hamelin, le Grain d’Sel devrait avoir en octobre une meilleure idée du portrait global et des besoins de l’organisme après le retrait complet des Chevaliers de Colomb.
Le Grain d’Sel dessert environ 85 familles par semaine réparties entre 12 municipalités, mais prévoit passer à 120 avec la fermeture du comptoir alimentaire des Chevaliers de Colomb. Pour arriver à servir cette clientèle supplémentaire, l’organisme se prépare à « agrandir de l’intérieur » en optimisant l’espace de son local situé au Mail Montenach.
Si le fonctionnement des deux comptoirs est quelque peu différent, Mme Hamelin invite les bénéficiaires désirant entamer leur transition dès maintenant à prendre rendez-vous prochainement pour faire évaluer leur dossier et se faire expliquer le fonctionnement du service. Lorsque la transition sera terminée, le Grain d’Sel dit qu’il redoublera d’efforts pour aller chercher de l’aide supplémentaire pour assurer son service, que ce soit auprès des municipalités touchées et des partenaires qui fournissent de la nourriture gratuitement ou à faible coût. « C’est sûr qu’on va négocier pour récupérer au moins une partie de la nourriture fournie par Moisson Rive-Sud aux Chevaliers de Colomb », confirme la directrice.
Doris Hamelin précise que le Grain d’Sel ne reprendra pas la guignolée en porte-à-porte, depuis longtemps organisée par les Chevaliers de Colomb, puisque c’est un projet qui nécessite beaucoup d’énergie, d’organisation et de travail, mais il continuera de concentrer ses énergies sur la Guignolée des médias, qui lui permet chaque année d’offrir des « paniers bonifiés » pour la période des fêtes.
Bénévoles bienvenus
Si certains bénévoles œuvrant au comptoir alimentaire des Chevaliers de Colomb désirent poursuivre leur implication communautaire, ils sont les bienvenus au Grain d’Sel, ajoute Mme Hamelin. « On a déjà une liste de bénévoles réguliers pour notre comptoir alimentaire, mais on a aussi d’autres services que les Chevaliers de Colomb n’offraient pas, comme le Resto-Pop ou le jardin collectif à Otterburn Park. Il y a moyen d’intégrer ceux qui le veulent. »
Une longue histoire
Cela fait longtemps que le comptoir alimentaire des Chevaliers de Colomb est dans la paysage de Belœil. Une photo d’archives datant de 1951 montre que l’organisation est impliquée dans la guignolée pour offrir des paniers de Noël aux familles démunies depuis plus de 70 ans, mais personne ne connaît avec certitude la date de leur toute première guignolée. Si, au début, ce n’était qu’une aide ponctuelle pour aider à passer une meilleure période des fêtes qui était proposée, un comptoir plus permanent est devenu avec le temps une nécessité, amenant des centaines de bénévoles au fil des années à contribuer à faire une différence.
Encore aujourd’hui, une quarantaine de bénévoles appuient encore régulièrement Sylvie Vézina, la responsable du comptoir, et plusieurs d’entre eux ont souligné à L’ŒIL leur fort attachement à ce service et à cette équipe « tissée serrée ». « C’est un beau service, c’est vraiment triste que cela ferme », se désole le bénévole Yves Lessard.
Malgré tout, le Grand Chevalier Claude Lebrun souhaite qu’on retienne le positif : tout le bien qu’a fait le comptoir au fil des décennies pour venir en aide aux personnes dans le besoin. « On peut être fiers de tout ce qu’on a réalisé et surtout des bénévoles passés et présents, qui ont fait tellement. J’ai envie qu’on les remercie tous pour leur précieuse implication », conclut-il.