19 mai 2021 - 14:57
Bilinguisme otterburnois
Par: Vincent Guilbault

Vincent Guilbault

Otterburn Park doit garder son statut bilingue. Oui, je crois, comme nos politiciens, que nous devons légiférer pour protéger notre langue. Mais Otterburn Park, c’est une autre patente.

Publicité
Activer le son

En déposant jeudi dernier son projet de Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le ministre de la Justice et député de Borduas, Simon Jolin-Barrette, proposait une quarantaine de mesures pour renforcer le fait français dans la province. Parmi ces mesures, les municipalités qui possèdent un statut bilingue, comme Otterburn Park, devront adopter une motion pour maintenir ce statut si leur population anglaise est sous la barre des 50 %.
Avec une population anglophone de 5,7 % selon le dernier recensement canadien, Otterburn Park est donc loin du compte.

Parfait, retirons-lui donc le statut, et fin de l’histoire. C’est d’ailleurs ce que me répond le député Pascal Bérubé, chef de l’opposition au Parti québécois. Il trouve d’ailleurs qu’on devrait tout simplement enlever le statut à la Ville, alors que Simon Jolin-Barrette préfère laisser aux villes le soin de trancher.

Mais dans les faits, qu’est-ce que ça mange en hiver un statut bilingue? Selon la version actuelle de la loi, la Charte de la langue française, une Municipalité bilingue peut utiliser le français et une autre langue dans ses communications. Mais à la demande d’un citoyen, une communication dans une autre langue, comme l’anglais, doit être traduite en français par la Ville. Les villes bilingues peuvent aussi afficher à la fois en français et dans une autre langue, mais le français doit être prédominant.

Otterburn Park devra donc se prononcer sur son statut bilingue.

Pris avec cette patate chaude, les élus d’Otterburn Park ont décidé de la refiler aux citoyens. Une consultation publique ou un sondage auprès de la population permettra de connaître la position des citoyens, et les élus décideront ensuite de maintenir ou pas le statut bilingue.

Avec 5 % de population anglophone, on peut prévoir que le statut bilingue n’aura pas la côte dans le sondage. Et c’est là la tristesse. C’est un exemple parfait selon moi d’une décision que des élus auraient pu prendre, même si elle va à l’encontre d’une opinion majoritaire, justement pour protéger les droits d’une minorité.

Car Otterburn Park n’est pas Montréal. Le défi de l’anglais n’existe pas ici. La vie est toute en français. Le statut ne vient avec aucune obligation; que quelques avantages techniques. Même le maire Denis Parent le reconnaît. « Le statut nous permet seulement de mettre un peu d’information en anglais dans [le bulletin municipal] l’Info Otterburn. »

La réalité otterburnoise, c’est que le bilinguisme n’est pas une condition à l’embauche et la Ville ne dépense aucuns frais en traduction. Les communications internes et externes sont en français. Les deux seuls courts textes en anglais dans l’Info Otterburn d’avril dernier (un document de 28 pages) proviennent directement des gens de la Légion canadienne.

Selon le maire, le chiffre de 5,7 % d’unilingues anglophones est même beaucoup trop élevé. « On doit être rendu à 2 % d’unilingues anglophones, et ils ont tous plus de 80 ans. Le bilinguisme, c’est un problème qui va finir par se régler de lui-même ici. »

Gardons le statut encore quelques années, pour nous permettre de communiquer (très minimalement) avec le peu d’anglophones unilingues qu’il reste, et nous pourrons ensuite abandonner le statut dans 5 ou 10 ans. En même temps qu’on tournera la page sur un chapitre de l’histoire anglophone d’Otterburn Park.

image