Geneviève est l’une des intervenante de la région que j’aime le plus appeler. Même si son organisme intervient dans des situations difficiles, c’est-à-dire auprès des hommes en difficultés ou en situation de violence, Geneviève est toujours passionnée par son sujet. J’ai beaucoup appris sur la dynamique de la violence conjugale en lui parlant et elle m’a forcé à me poser beaucoup de questions sur moi et sur la condition des hommes.
Je l’avais rencontrée avec l’intervenante psychosociale Audrey Lincourt et le capitaine de la Régie intermunicipale de police Richelieu–Saint-Laurent Francis Lepage l’année dernière (deux autres passionnés) dans le cadre du lancement du projet pilote d’un intervenant de proximité. J’avais passé je ne sais combien de temps avec les trois instigateurs du projet; c’était la première fois que je voyais des intervenants aussi convaincus du bien-fondé d’un projet. Geneviève m’avait carrément dit que cette initiative était un point tournant en matière de violence conjugale. « Je suis convaincue. Ce n’est pas encore documenté, mais j’ai la prétention de dire qu’on va réduire le nombre de cas de violence conjugale et le nombre de féminicides. »
Pourquoi? Parce que dans le cas de violence conjugale, et surtout dans les cas de féminicide, l’homme est souvent connu des milieux policiers. On ne pourra jamais enrayer la violence, mais les trois intervenants pensent qu’on peut s’attaquer à l’aspect de la récidive.
Et leur idée est tellement simple, même Geneviève l’admet : on arrête l’homme pour violence conjugale, comme avant. Mais quelques heures ou jours après l’arrestation, on contacte l’homme. Juste pour l’écouter, lui permettre de ventiler de son arrestation, lui offrir un soutien. En gros, briser le cycle de la violence et de la frustration. Bien sûr, l’individu devra faire face à la justice et rien ne peut justifier les gestes qu’il a commis. Mais si on peut court-circuiter le processus de récidive, on va peut-être empêcher un autre épisode de violence de sa part. On pourrait même sauver une vie. On le verra dans le temps, mais après presque un an, et plus de 275 dossiers d’ouverture, on peut l’espérer.
Et pourtant, c’était une idée si banale. Peut-être trop, c’est pour ça qu’il aura fallu autant de temps pour que l’on y pense. Mais une idée maintenant qui intéresse un peu tout le monde, que ce soit les autres services de polices de la province ou encore le ministère de la Justice. C’est peut-être en prenant le problème à la base qu’on va éviter justement d’autres féminicides. Je l’espère, parce que ça devenait un peu gênant pour la province…