14 février 2024 - 07:00
Cohérence
Par: Vincent Guilbault
Vincent Guilbault

Vincent Guilbault

Mardi dernier, le ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Benoit Charrette, a convié les médias locaux à une rencontre pour discuter du projet Northvolt. Cette entrevue n’était pas sollicitée par le journal, mais lorsqu’un ministre vous propose quelques minutes de son temps, vous acceptez.

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L’idée était de répondre aux questions de nos lecteurs concernant l’angle environnemental. Nous n’avons donc pas abordé les questions plus larges du transport ou de l’emploi, par exemple. Et concernant l’environnement, je ne m’attendais pas à obtenir de scoops ou de nouvelles informations; je savais que le ministre proposait cet exercice en partie pour informer, mais aussi pour faire passer son message.

Ceux qui suivent scrupuleusement le dossier n’y apprendront pas grand-chose, mais j’espère que le compte rendu de cette rencontre, publié en page 10, permettra de mieux saisir la position du ministère, du ministre et du gouvernement de la CAQ. Et ceux qui espéraient un peu plus d’informations et de précisions concernant le BAPE seront encore une fois très déçus.

Car essentiellement, pendant la discussion, j’ai discuté avec M. Charrette du BAPE. Comme il le rappelle, la construction de batteries aura certainement un impact positif sur l’électrification des transports et la décarbonation. Mais ce n’est pas ce que les citoyens et spécialistes remettent tant en question, comme vous le savez maintenant. On se demande pourquoi le gouvernement a modifié ses règles en février 2023 concernant les entreprises de la filière batterie, ce qui a permis à Northvolt d’être exempté à la procédure du BAPE. Et la deuxième question, c’est de savoir s’il s’agit du bon site pour ce projet, et est-ce que la destruction de milieux humides en vaut le coup. Malheureusement pour ça, le discours de la CAQ n’a pas changé. Même si Radio-Canada souligne le contraire, le ministre maintient que Northvolt n’a pas eu de passe-droit pour le BAPE. Il faut comprendre que c’est presque un hasard si le gouvernement a revu ses règles quelques semaines avant la rumeur d’une venue de l’entreprise suédoise. Même si on insiste auprès du ministre pour lui dire que ça, ça ne passe pas auprès de la population, rien à faire; il persiste et signe, ajoutant du même coup que si Northvolt (et d’autres entreprises) vient s’installer au Québec, c’est aussi en raison de la prévisibilité de la réglementation. Et celle pour être soumise ou non à un BAPE est claire, dit-il.

Et lorsqu’on lui parle de destruction de milieux humides, on a droit à la même réponse : Northvolt va compenser les pertes en protégeant un terrain (ailleurs), Northvolt est un bon citoyen corporatif (on n’en doute pas) et les règles du Québec sont parmi les plus strictes au monde (on verra).

Je ne comprends pas pourquoi la CAQ, à ce stade-ci, ne fait tout simplement qu’assumer ses décisions et ses entourloupes au lieu de tenter de nous faire croire que tout ce qui arrive est le fruit du hasard et que l’arrivée de l’usine aura peu d’impacts sur l’écosystème de la région. Le gouvernement pourrait simplement assumer ses contradictions, nous confirmer que tout a été fait pour accommoder Northvolt, notamment en soustrayant volontairement l’entreprise à un processus du BAPE, et que la perte des milieux humides, et bien ça fait partie du deal pour que le Québec devienne l’un des gros joueurs dans la filière batterie. Ça ne rendrait pas l’opération plus écologique pour l’ancien terrain de la CIL, mais peut-être plus cohérente. Et les citoyens de la région sentiraient peut-être qu’on les prend un peu moins pour des valises.

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