Lucie Deslauriers a participé à différentes activités offertes par la Ville de Belœil, y compris des cours de Zumba et de conditionnement physique. Elle a toutefois remarqué que l’ensemble des chansons utilisées pendant ces activités étaient en anglais. Elle a fait des propositions aux professeurs pour faire jouer des chansons québécoises, ou à la rigueur instrumentales, à la place, mais elle dit avoir reçu un accueil tiède de leur part. C’est à ce moment qu’elle s’est tournée vers d’autres organisations pour obtenir gain de cause.
En plus d’approcher directement la Ville de Belœil, elle a reçu une réponse venant du ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH) au sujet de la nouvelle mouture de la Charte de la langue française adoptée en 2022, renforçant sa portée. « La “nouvelle” Charte établit désormais le devoir d’exemplarité de l’État relativement à l’utilisation, à la promotion, au rayonnement et à la protection de la langue française. Le principe général d’exemplarité veut que toute communication de l’Administration (incluant les municipalités) soit faite exclusivement en français. Cela s’applique, notamment, à la langue des services rendus au public », peut-on notamment lire dans un courriel transmis par Daniel-Joseph Chapdelaine, conseiller en affaires municipales au MAMH, à Mme Deslauriers le 13 février dernier.
Cette réponse fait dire à la citoyenne que la Ville contreviendrait à la loi si elle continuait de tolérer l’anglais dans ses cours, même si c’est seulement dans la musique. Sa proposition est donc que « Belœil adopte un règlement visant à se conformer aux exigences de la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, et que ce règlement soit intégré dans les contrats entre la Ville de Belœil et ses fournisseurs de services, et ce, dans les meilleurs délais ». « J’ai senti que la Ville était favorable à établir un règlement qui s’appliquerait aux fournisseurs de services, mais on m’a dit que l’administration avait peur que les professeurs partent s’ils étaient obligés de changer leur programmation. » Maintenant qu’elle a fait sa proposition, elle a hâte de connaître la position que prendra la Ville dans ce dossier. « Et si la réponse n’est pas positive, je vais porter plainte à la Commission municipale du Québec pour que ça change », poursuit Lucie Deslauriers. Si jamais la Ville de Belœil était reconnue comme fautive en permettant la diffusion de musique en anglais dans ses cours, cela pourrait possiblement créer un précédent pour les autres municipalités du Québec.
Réponse de la Ville
À travers sa porte-parole Émélie Trinque, la Ville de Belœil rappelle qu’elle est « engagée activement dans la protection et la promotion de la langue française à travers plusieurs initiatives » et qu’elle respecte « pleinement les exigences légales en matière linguistique ».
Concernant la demande spécifique de la musique en français dans les cours de mise en forme, la Ville se montre plus nuancée. « À l’heure actuelle, bien que tous les cours soient dispensés en français […], les professeurs peuvent utiliser un support musical adapté à leur discipline, qui peut inclure des chansons dans d’autres langues. Après analyse de cette demande et discussions avec les professeurs concernés, il apparaît que la Politique linguistique de l’État recommande de privilégier le français pour la musique vocale diffusée sur certaines plateformes publiques […]. Toutefois, cette recommandation ne s’étend pas explicitement aux cours de mise en forme », explique Mme Trinque.
« Dans ce contexte, sachant que l’ensemble des cours se déroulent en français et que les options de musique québécoise correspondant aux critères techniques requis sont limitées (tempo spécifique requis pour ce type de cours de mise en forme), la Ville de Belœil considère justifiée l’utilisation de certaines chansons en d’autres langues. Imposer exclusivement du contenu musical en français mettrait en péril la qualité et la tenue même de ces cours, faute de répertoire adapté », poursuit la porte-parole de la Ville, qui assure que les professeurs ont été sensibilisés à cet enjeu et qu’ils sont invités à privilégier autant que possible le français dans leurs choix musicaux.