M. San était d’ailleurs de la séance, à la fois pour exposer à nouveau la situation qu’il a relatée au journal il y a quelques semaines, soit son obligation de hausser ses prix pour arriver à éponger la hausse de son compte de taxes, et pour demander à la mairesse, Nadine Viau, si d’autres hausses du même genre l’attendent dans les prochaines années. Cécile Poteau, copropriétaire de la Clinique bē, a aussi envoyé par écrit des questions qui allaient dans le même sens.
La propriétaire de la jeune entreprise Consultons local, Audrey Gilker, s’est aussi présentée au micro pour décrire sa difficile situation financière. Son entreprise spécialisée dans le bien-être autant physique que mental n’existe que depuis novembre 2021, mais voilà que le compte de taxes de sa bâtisse vient d’exploser, passant d’environ 6600 $ à 11 000 $ en un an. « Ça en est au point de me demander si je vais fermer mon entreprise », a-t-elle déploré.
En entrevue avec L’ŒIL, Mme Gilker a toutefois soutenu qu’elle n’avait pas l’intention de hausser ses prix malgré cette hausse importante. « Je travaille dans le bien-être. Mon but est d’aider la population qui en arrache particulièrement depuis trois ans, alors je me vois mal les faire payer davantage. Mais si rien ne change, c’est sûr que ça va être difficile. » Elle précise d’ailleurs que c’est l’article dans le journal qui l’a amenée à se présenter au conseil, se faisant en quelque sorte la porte-parole pour d’autres commerçants de Belœil qui digèrent mal leur dernier compte de taxes, mais qui ne sont pas tous prêts à sortir publiquement pour le dénoncer. « Mon pourcentage d’espoir que ma sortie ait un impact sur mon compte de cette année n’est pas très haut, mais je parle parce que je veux que les choses changent pour le mieux à l’avenir », a-t-elle soutenu. Elle confirme aussi que la nouvelle évaluation du bâtiment qui abrite son entreprise a été contestée, mais qu’elle ne sait pas encore si la démarche diminuera de beaucoup sa valeur.
Nicolas Garcia, propriétaire du café Quartier Général du Vieux Belœil, a aussi parlé au journal. Sans se plaindre de son propre compte de taxes, il trouve dommage de voir que ce sont les commerçants qui paient pour l’entièreté de la hausse du dernier budget de la Ville. « La Ville aurait dû prendre le pouls des commerçants avant d’aller de l’avant. C’est un choix politique qui fait mal à plusieurs commerces. » Il craint de voir plusieurs entreprises plus fragiles fermer leurs portes à cause des impacts de cette hausse. Augmenter les prix pour faire payer la hausse à la clientèle est selon lui une fausse solution puisqu’elle pourrait simplement aller ailleurs où c’est moins cher.
Choix assumé
En réponse aux questions posées au conseil, la mairesse Nadine Viau a reconnu qu’il n’y avait « pas de bonne solution » qui plairait à tous quant aux taxes foncières, qui sont la principale source de revenus de toute Municipalité, mais a maintenu que le conseil avait fait le choix d’épargner les résidents en n’augmentant pas leurs taxes foncières. Quant à la décision de seulement imposer une hausse aux entreprises de Belœil, elle s’explique par le fait qu’il y avait un « retard » dans les taux commercial et industriel par rapport aux autres villes comparables. « Et l’impact [du compte de taxes foncières] n’est pas le même dans un budget familial que dans celui d’une entreprise », a-t-elle ajouté, illustrant des histoires de familles qui n’arrivent pas à manger trois repas par jour.
Mme Viau s’est tout de même dite sensible aux questions et a assuré qu’elle souhaitait « baisser la pression des entreprises ». « On a l’intention de soutenir le développement économique et de soutenir nos entreprises. […] Depuis huit mois, il n’y a personne au développement économique pour la Ville; maintenant, une personne a le mandat de revoir la trame industrielle et de voir comment la Ville peut être proactive pour les entreprises. On ne veut pas leur mettre de bâtons dans les roues. »
En entrevue, elle a confirmé qu’elle croit toujours avoir pris la bonne décision lors de l’adoption du budget. « À l’automne, on voyait un beau développement économique à l’horizon et ce ne sont pas toutes les entreprises qui vont mal : sur 840 entreprises sur notre territoire, certaines ont fait de très bonnes affaires ces dernières années. » Mme Viau est consciente qu’il est possible que certaines entreprises ferment dans les prochains mois et les prochaines années, mais relativise l’importance de la hausse des taxes dans une éventuelle fermeture. « Si cette simple hausse dans ce poste budgétaire les amène à avoir des problèmes financiers, il y a des remises en question qui devraient être faites. »
Elle soutient que l’administration de la Ville a reçu le mandat de trouver rapidement un programme pour venir en aide aux entreprises, particulièrement celles qui viennent de démarrer et qui ont donc les reins moins solides. « On regarde aussi du côté de la MRC [de La Vallée-du-Richelieu] pour du soutien et de l’accompagnement. […] On n’a pas encore d’échéancier, mais on a hâte d’annoncer quelque chose en ce sens. »
Audrey Gilker affirme avoir parlé de vive voix avec la mairesse ces dernières semaines et sent son réel désir de venir en aide aux entreprises de Belœil. « Je suis assez satisfaite de sa réponse. Je sens qu’elle prend action et que ça lui tient à cœur. J’espère qu’il sera possible de nous aider à passer à travers cette épreuve de plus qui s’ajoute à la pandémie », conclut-elle.