2 novembre 2022 - 07:00
Dernière séance du conseil
Des élus demandent à Oser Belœil de rembourser l’élection
Par: Olivier Dénommée

Nadine Viau Photothèque L'Oeil Régional

Renée Trudel. Photothèque L'Oeil Régional

Martin Robert L'Oeil Régional

Le ton a monté à la dernière séance ordinaire du conseil municipal de Belœil, le 24 octobre. L’ajout d’une résolution à la dernière minute demandant au parti Oser Belœil de rembourser l’ensemble des frais encourus par l’élection partielle de juin dernier a soulevé les passions parmi les élus des différents partis autour de la table et mené à certains dérapages.

Publicité
Activer le son

Selon la résolution lue par Renée Trudel, un courriel envoyé par la Commission municipale du Québec (CMQ) le 11 octobre tire la conclusion que Marc-Olivier Bérubé avait été déclaré « inhabile à siéger puisque élu alors qu’inéligible », car il ne demeurait pas sur le territoire de Belœil depuis au moins 12 mois au moment de se présenter. M. Bérubé, qui s’était présenté sous la bannière d’Oser Belœil à l’élection partielle du 12 juin, a par la suite démissionné en septembre, soit à peine plus de trois mois après son élection. Mme Trudel blâme le parti d’avoir maintenu sa candidature même si la question sur son éligibilité avait été soulevée dès le 23 mai et demande donc à Oser Belœil de rembourser l’ensemble des frais encourus par cette élection, estimés à 40 000 $.

Cette interprétation du courriel de la CMQ n’était pas partagée par les élus issus de la même formation politique que Marc-Olivier Bérubé. Le conseiller Karim-André Laz, aussi de Oser Belœil, souligne que la Commission peut émettre des avis juridiques, mais ne peut pas tirer des conclusions sur la question de l’éligibilité d’un élu. « Quiconque essaie de dire que M. Bérubé a été déclaré inhabile fait fausse route. » Le débat est peu après devenu houleux et émotif, notamment entre la mairesse Nadine Viau et le conseiller Martin Robert sur la question de l’intégrité de celle-ci dans le dossier de l’éligibilité de son ancien candidat.

Une fois que le vote a été demandé sur la résolution, un autre litige a émergé : Nadine Viau, en sa qualité de cheffe d’Oser Belœil, était-elle en conflit d’intérêts pour ce vote? Sur sept conseillers, la résolution a obtenu quatre voix « pour » et trois « contre » et la mairesse souhaitait ajouter son vote pour arriver à l’égalité et donc battre la résolution. Devant la contestation de certains élus, elle a finalement opté pour le veto, le temps qu’elle obtienne un avis juridique sur la question d’ici la prochaine séance du 28 novembre, où le point devra inévitablement revenir à l’ordre du jour.

« Les citoyens méritent mieux » – Nadine Viau
La séance ordinaire du 24 octobre est devenue très émotive au sein du conseil à la suite de la présentation de la résolution controversée et a mené à certains dérapages (voir autre texte). L’Œil Régional a souhaité accorder la parole aux différentes parties impliquées avec un pas de recul.

Pour la mairesse de Belœil, Nadine Viau, la présentation de la résolution au point varia demandant à son parti, Oser Belœil, de rembourser les frais de la précédente élection partielle est une menace que les autres partis ont mise à exécution parce que sa formation présente un candidat à la prochaine élection, qui doit se tenir en décembre, pour remplacer Marc-Olivier Bérubé. « Ils ont finalement mis à exécution leur chantage. Ça a été déposé en surprise, sans respecter la régie interne ni mentionner d’avance l’intention de présenter la résolution. Ça a été déposé comme une bombe », affirme-t-elle.

Selon la régie interne des rencontres du conseil, Renée Trudel, qui a présenté la résolution, aurait dû faire connaître son intention avant la séance. « Cet ajout aurait pu être refusé par la mairesse, ou encore elle aurait pu demander le vote, mais elle ne l’a pas fait et l’ajout a donc été accepté », note la directrice générale de la Ville de Belœil, Martine Vallières. Mme Viau reconnaît qu’elle ne connaissait pas dans le détail la régie interne et donc qu’elle ignorait qu’elle aurait simplement pu bloquer la fameuse résolution.

Pour sa part, Renée Trudel, du parti Belœil gagnant, estime qu’elle ne voyait pas d’autre option que de demander l’ajout au point varia pour amener publiquement cette résolution puisque ses demandes en privé faisaient systématiquement face à une fin de non-recevoir. « On sent qu’il y a une frustration des citoyens qui sont ceux qui paient les frais d’une deuxième élection partielle en quelques mois. On voulait dire qu’on les entend et que les gens sont imputables. » Elle avoue ne pas connaître de précédent de parti qui a remboursé la totalité des frais d’une élection, mais espère qu’Oser Belœil répondra à la positive à cette demande. Or, Nadine Viau a clairement signifié au journal qu’il n’en est pas question, même si la résolution venait à être adoptée, puisqu’elle n’est pas contraignante.

Tristesse
Au moment de l’entrevue jeudi dernier, Mme Viau n’avait toujours pas eu de dialogue avec les conseillers opposants, mais elle assure qu’un retour avec l’ensemble du conseil doit avoir lieu prochainement par rapport à la régie interne et au code d’éthique qui ont été « grafignés » selon elle. « On s’est accusés, pointés du doigt, coupé la parole… Le soir même, j’étais vraiment triste qu’on soit allés dans cette direction. On peut ne pas être d’accord, mais il y a toujours moyen de discuter. […] Je suis triste de l’émotion dans laquelle cette histoire m’a amenée et, le lendemain matin, j’ai demandé à l’équipe d’avocats de la Ville une rencontre pour faire un bilan de la soirée. Je ne veux plus que ça se reproduise parce que ça ne donne rien sauf faire décrocher les citoyens. […] Le conseil et les citoyens méritent mieux [que ce à quoi ils ont assisté le 26 octobre]. […] Je pense qu’on a tous des excuses à faire à la population à la prochaine séance. »

Zone grise
Concernant le sujet de l’éligibilité de Marc-Olivier Bérubé, Nadine Viau avoue qu’il y avait une « zone grise », mais qu’elle était prête à aller jusqu’au bout des démarches à la Cour supérieure pour en avoir le cœur net. « Mais [Marc-Olivier] ne voulait pas aller là et il a choisi de démissionner au lieu de mettre sa vie privée sur la place publique », répète-t-elle, soutenant qu’elle demeure persuadée qu’il aurait gagné sa cause. « Avec du recul, c’est sûr que je m’assurerais de ne plus laisser de zone grise [pour prêter flanc aux attaques]. »

Quant à la lettre envoyée par la CMQ le 11 octobre, dont Renée Trudel a fait mention dans sa résolution pour justifier la demande de remboursement des frais électoraux, la directrice générale de Belœil se montre prudente. « Dans la lettre, il n’y a pas de conclusion comme telle. Je comprends que M. Bérubé a démissionné et donc que la CMQ a fermé le dossier. Ce qui porte à confusion, c’est le titre de l’enquête, mais on ne peut présupposer de quoi que ce soit ni tirer de conclusions [sur l’issue de l’enquête] », nuance Martine Vallières.

image