19 août 2024 - 05:00
Saint-Mathieu-de-Belœil encore sous l’eau
Des résidents songent à un recours judiciaire
Par: Vincent Guilbault
Saint-Mathieu-de-Belœil a été gravement touchée par le passage de la tempête tropicale Debby. Photo gracieuseté

Saint-Mathieu-de-Belœil a été gravement touchée par le passage de la tempête tropicale Debby. Photo gracieuseté

Les employés ont été déployés sur le terrain pendant plus de 24 heures, souligne la Municipalité. Photo gracieuseté Photo gracieuseté

Les employés ont été déployés sur le terrain pendant plus de 24 heures, souligne la Municipalité. Photo gracieuseté Photo gracieuseté

Plusieurs résidences du « secteur des fleurs » à Saint-Mathieu-de-Belœil ont été victimes d’inondations lors des pluies intenses du vendredi 9 août alors que les rues ont été complètement submergées. Toutefois, plusieurs propriétaires du secteur n’en sont pas à leur première inondation. Les précipitations record de vendredi n’expliquent pas à elles seules les débordements, et plusieurs résidents songent cette fois à se tourner vers les tribunaux.

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Avec le passage prévu de la tempête Debby, la Municipalité de Saint-Mathieu-de-Belœil s’est mobilisée pour soutenir le réseau de pompes en collaboration avec une entreprise de pompage. Mais vers 21 h, avec la panne de courant et le bris d’une pompe, la Municipalité explique « que les eaux du ruisseau Belœil ont commencé à sortir de leur lit […] et ont engendré des débordements rapides des eaux dans les rues ». Une résidente vivant près du ruisseau ne croit pas que ce dernier ait débordé, mais que c’est plutôt le réseau qui n’a pas été en mesure de tout évacuer.

Même si la Municipalité n’est pas en mesure de chiffrer le nombre de résidences touchées par les pluies de vendredi, on constate, en circulant dans le secteur, plusieurs sous-sols vidés et des meubles sur le bord des routes ou encore des conteneurs. Près d’une cinquantaine de résidents se sont rencontrés le dimanche 11 août au parc des Pivoines pour discuter de la possibilité d’intenter un recours collectif. Déjà, la Municipalité fait face à plusieurs poursuites en provenance de compagnies d’assurance qui réclament des indemnités concernant d’autres épisodes d’inondations.

Selon les résidents, la Municipalité doit être tenue responsable des nombreux débordements du ruisseau Belœil, qui accueille les eaux pluviales de la municipalité. Malgré la présence de deux stations de pompage dans le secteur des fleurs, l’eau en provenance des égouts sanitaires remonte dans les maisons, un problème qui survient fréquemment. « Certains ne sont plus assurables », souligne une propriétaire qui désire garder l’anonymat. Elle a d’ailleurs été inondée en octobre dernier, comme plusieurs autres, alors que d’autres ont été victimes d’inondations en janvier dernier.

« Ça fait des années que ça dure, dit-elle. Ce n’est pas un problème nouveau qui découle des réchauffements climatiques, mais un problème d’infrastructures. On baigne dans la merde, c’est dégueulasse. Nous n’avons pas de qualité de vie. Beaucoup venaient de terminer leur sous-sol, et c’est à recommencer. »

Récurrent

La famille Beaumier, résidant sur la rue du Muguet, venait tout juste de terminer la rénovation de leur sous-sol. C’est la deuxième fois que la famille de quatre est inondée depuis son arrivée dans la région il y a deux ans. Ils ont d’abord été victimes d’une inondation en octobre dernier. Après avoir investi près de 10 000 $ dans le sous-sol, en plus d’environ 4000 à 5000 $ en expertise, ils ont aussi été victimes des inondations le 9 août dernier. « Les rénos n’auront pas duré longtemps », ironise Françoise Beaumier. Dès que l’eau est montée dans la rue, de l’eau sale s’est infiltrée dans leur maison par un drain, explique Mme Beaumier en entrevue. Les nombreux clapets n’ont pas été suffisants, et la sump pump a cessé de fonctionner lors de la panne d’électricité. Elle craint aussi de ne plus être assurable. Déjà, elle a reçu une hausse de 600 $ annuellement sur sa prime depuis les événements d’octobre.

Jacques Deslauriers, résident de la rue des Jonquilles, est l’un des plus chanceux qui a réussi à éviter un débordement, en utilisant notamment une pompe dans sa douche du sous-sol pour envoyer l’eau viciée à l’extérieur. Pourtant, en plus de son drain français, il a réalisé plusieurs modifications dans son sous-sol, dont notamment l’ajout d’un clapet sur la conduite principale, pour un montant de 1500 $. Malgré tout, il a dû passer la soirée dans son sous-sol à pomper l’eau.

Mais il n’a pas été aussi chanceux en octobre dernier, lorsque son sous-sol a été inondé en raison de fortes pluies. Il a dû complètement rénover son sous-sol pour un montant qu’il estime à un peu plus de 30 000 $.

M. Deslauriers a connu au moins six épisodes de débordements depuis son arrivée en 2008. Il se fait un peu le porte-parole des résidents pour discuter avec les médias. Il est intervenu plusieurs fois en séance du conseil municipal depuis 2019. Depuis, la Municipalité fait des études et promet d’agir, mais rien ne bouge vraiment, constate-t-il, lui qui ne blâme pas les élus ou les employés directement.

Françoise Beaumier est actuellement en mode de gestion d’urgence, avec l’acquisition d’une nouvelle pompe et d’une génératrice. Mais ensuite, elle et ses voisins songent à se tourner vers un recours judiciaire. « On constate que la Municipalité n’a pas la compétence et qu’elle est limitée. Je les sens dépassés, même s’ils font des choses. C’est un problème de territoire, et nous voulons aussi interpeller les instances supérieures. Pour le moment, on approche des avocats. Les inondations, c’est un problème global. »

La suite

La Municipalité reconnaît le problème d’inondation dans le secteur des fleurs. « On constate un problème quand il y a de fortes pluies », admet Normand Teasdale, maire de la Municipalité.

Ce que plusieurs sinistrés s’expliquent mal, c’est que les débordements proviennent des conduites sanitaires (égouts), alors que c’est le réseau pluvial (eaux de pluie) qui déborde. Selon le maire, le problème n’a pas été réglé avec les années puisque les causes des débordements pourraient être multiples. En plus des eaux pluviales de Saint-Mathieu, le ruisseau Belœil accueille aussi celles de Saint-Bruno et de Sainte-Julie. Les eaux provenant de l’important milieu agricole s’y déversent aussi. « Oui, il y a un impact si on veut être honnête, mais à quel point? »

La Municipalité a effectué aussi plusieurs études et pense que plusieurs domiciles ont des raccordements inversés, ce qui veut dire que les eaux sanitaires se déversent dans le réseau pluvial.

Questionné sur la suite des choses, le maire souligne en entrevue vouloir régler le problème une fois pour toutes. La Municipalité a entrepris plusieurs démarches pour rendre le réseau plus résilient face aux changements climatiques, dit-il, en se concentrant d’abord sur l’évaluation du réseau actuel. Depuis octobre, des actions telles que le nettoyage des conduites, des inspections par caméra et des tests de fumée ont été menées pour comprendre les problèmes liés aux volumes d’eau importants. En parallèle, des études ont été réalisées avec l’aide de la Fédération québécoise des municipalités (FQM) pour améliorer l’efficacité des stations de pompage. La Municipalité prépare aussi l’aménagement de bassins de rétention, prévu idéalement pour le printemps 2025. Le maire a confirmé que les bassins de rétention seront construits « avec ou sans subvention ». Lors de la séance publique du 5 août dernier, un contrat a été octroyé à la firme Services EXP pour réaliser l’étude géotechnique et la caractérisation environnementale des déblais potentiels.

Aucune rencontre n’est prévue avec le public pour le moment, mais le maire assure que la Municipalité répond aux sinistrés. Il est conscient que de nombreux citoyens se présenteront à la prochaine séance publique du 3 septembre.

La Municipalité a aussi préparé une section dédiée aux inondations sur son site Web et invite les propriétaires touchés par les refoulements ou les infiltrations d’eau à contacter la Municipalité par le biais d’un formulaire. La Municipalité a aussi placé un conteneur dans le parc des Pivoines, dans lequel les citoyens pourront se départir de leurs matériaux de construction souillés ou de leurs gros rebuts.

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