François Bourgault aura traîné pendant une trentaine d’années les films de son grand-père, sauvés de la poubelle alors qu’une tante qui les avait en sa possession faisait du ménage à la suite d’un dégât d’eau chez elle, avant de se « faire un cadeau » en entreprenant de numériser les 6 heures de matériel. Il s’y est vu jeune, de même que son père naissant, et a vécu à travers les enregistrements certaines vacances familiales. Mais il ne s’attendait certainement pas à aussi y voir la reine Élisabeth II en 1951 pendant une visite au Québec alors qu’elle était encore princesse! « Ça a été tourné à Drummondville. J’ai trouvé peu d’articles précis sur cet arrêt et la Société d’histoire de Drummond m’a dit qu’elle n’avait aucun matériel filmé de cet événement. C’est fou que des images de ma famille soient entrecoupées d’événements historiques comme ceux-là! »
Les bobines montrent aussi une parade de la Saint-Jean-Baptiste, autour de 1942, avec le drapeau de Carillon présenté sur un char allégorique, alors que le Québec n’avait toujours pas son drapeau officiel à l’époque, ou encore la marche de la Victoire à la fin de la Seconde Guerre mondiale. « À travers les moments familiaux, je vois des événements historiques et des traditions qui se sont perdues avec le temps. J’avais déjà envie de faire un petit film pour ma famille, mais ces découvertes m’ont vraiment donné envie de pousser plus loin et d’en faire un documentaire », souligne François Bourgault, issu de la même famille qu’un certain Pierre Bourgault. « Avoir quelqu’un de sa trempe dans la famille, ça a du bon, mais aussi du mauvais dans mon cas », confie cet ancien militaire, dont le nom était parfois mal vu à cause des nombreuses causes que Pierre Bourgault défendait avec passion.
Pour l’Otterburnois, il est évident qu’il doit raconter l’histoire de sa famille, qui a mis le pied en Nouvelle-France en 1687 et qui a presque toujours vécu le long du Richelieu. D’ailleurs, le premier Bourgault à venir s’installer au Québec était lui-même un soldat, note François Bourgault, qui prend plaisir à faire des recherches sur sa famille depuis qu’il réalise à quel point elle a vu de près les événements importants et l’évolution de la société québécoise.
Pour ses proches, il a l’intention de compléter un petit montage d’ici cet été, mais il ne compte pas s’arrêter là. « Il y a matière à faire un vrai documentaire qui montre la Révolution tranquille à travers le regard de ma famille. La difficulté que j’ai est de trouver la bonne échelle à ce projet : je vois ça très gros et j’aimerais faire des entrevues et récolter des témoignages, notamment de gens qui ont côtoyé Pierre, mais je n’ai pas encore les ressources et les contacts pour y arriver pour le moment », reconnaît François Bourgault, qui ne perd toutefois pas espoir.
Cri du cœur
Si François Bourgault est issu d’une famille qui a eu une certaine importance, il soutient qu’à peu près tout le monde a peut-être chez lui des archives d’une grande valeur sans même le savoir. « Maintenant, tout est pris en photo et est filmé, mais ce n’était pas nécessairement le cas dans ma génération. Si on ne fait pas attention, on pourrait perdre une partie de notre histoire. » Il insiste d’ailleurs auprès de ceux qui traînent de vieux documents chez eux sans trop savoir quoi en faire. « Ne les jetez surtout pas! C’est tout simplement incroyable la richesse qu’on peut y trouver si on cherche bien. »