21 juin 2018 - 16:37
En salle de spectacle
Par: Vincent Guilbault
Vincent Guilbault

Vincent Guilbault

Martin Pilon me montre la sacristie à l’arrière de l’église Saint-Charles-sur-Richelieu. Les 25 fidèles peuvent facilement s’entasser dans cette petite salle. La messe y est plus conviviale, aussi. Proximité avec le curé oblige.

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Tenir la messe dans le chœur de l’église, devant l’autel, coûte trop cher. Et l’argent ne coule pas à flots, comme c’est le cas dans bien des églises de la province.
Pour le marguiller, il est impensable pour l’église de tenir le rythme plus de cinq ans avec les revenus provenant exclusivement de la dîme (de moins en moins payée) ou des dons de la quête. Et le membership se renouvèle lentement.
Quelques jours après ma rencontre, à quelques kilomètres de là, j’ai assisté à l’inauguration de la restauration de la cloche Marguerite-Michel, à Saint-Denis-sur-Richelieu. L’événement, politique d’abord pour son indissociable lien avec l’histoire des Patriotes, en était aussi un religieux, par la nature même de l’objet. Le chanoine Denis Lépine s’est adressé aux enfants en leur souhaitant de vivre tout le bonheur qui vient avec la foi chrétienne. J’ai pris la peine de les regarder, ces jeunes, et je n’ai vu que des regards dubitatifs. Ces notions sont pour eux très floues, ce qui n’était pas le cas pour moi à leur âge. Je n’ai pas senti la ferveur religieuse dans leur expression.
Quelques semaines avant, j’ai assisté à un spectacle pour enfants dans cette même église avec ma fille de cinq ans.
— «Pourquoi y a-t-il un homme cloué sur une croix, papa? Il me fait peur.»
— «Woah. En fait ma grande, cet homme est Jésus. Disons qu’il avait un beau message d’amour, mais ça n’a pas plu à tout le monde. Il s’est sacrifié pour s’assurer que son message soit entendu, si on veut.»
J’ai 35 ans, j’ai reçu tous les sacrements de la réconciliation (Baptême, Confirmation, Eucharistie) et j’ai encore en mémoire mes cours de religion, mes cours de préparation aux sacrements et mes nombreuses heures à écouter le curé.
Ma fille n’aura pas cette «chance». Oui, je suis parfois contradictoire. Je suis un grand pourfendeur de religion. Mais j’ai quand même une sensibilité… chrétienne, avouons-le. Et entre vous et moi, le message d’amour et de pardon, au-delà de la foi, c’est une belle philosophie de vie.
Avec l’argent de la location, Martin Pilon me dit que la salle servira d’abord à faire survivre le bâtiment. L’église de Saint-Charles n’est pas un bâtiment patrimonial. Ça n’en fait pas moins un endroit important, historique… sacré! L’église ne sera pas dénaturée, et les visiteurs pourront s’imprégner de son histoire lors de leur passage; des visiteurs qui ne seraient pas entrés en ses murs.
Des visiteurs qui pourront raconter à leurs enfants l’histoire du petit Jésus. Non pas pour les «convertir», mais bien pour les instruire. Pour permettre à ma fille et mon garçon de comprendre la signification de la croix sur la devanture de leur école ou sur leur drapeau, ainsi que de comprendre pourquoi ils vivent dans un village portant le nom d’un saint.

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