Les trois promoteurs dénoncent, études à l’appui, l’orientation radicalement différente de la phase 5 des Bourgs de la Capitale depuis l’élection de novembre 2021. Selon eux, cette orientation, inspirée en partie par les quartiers de Copenhague et une proposition de l’architecte Pierre Thibault, se traduira par une importante hausse du prix des logements et par des contraintes liées au stationnement dans ce secteur qui doit accueillir près de 10 000 personnes.
Toutefois, les promoteurs n’ont pas rendu publiques ces études. De plus, malgré la publicité dans nos pages, ils ont refusé notre demande d’entrevue. Leur prétention d’une perte de 136 millions de dollars est donc impossible à vérifier.
Bien sûr, les trois promoteurs affirment que leur engagement est de « construire des milieux de vie accessibles et durables, adaptés à la réalité des familles ». J’ajouterais un bémol : le but premier des promoteurs immobiliers est de faire de l’argent. Ce n’est pas un reproche; c’est la racine même de notre système capitaliste. Gardons cela en tête.
En gros, le projet pourrait coûter plus cher, disent-ils, et ce sont les acheteurs qui en paieront le prix.
Ce n’est pas innocent non plus que cette publicité paraisse à quelques semaines des élections. Les promoteurs soutiennent que c’est plus difficile depuis que Nadine Viau est à la tête de la Ville. Je n’ai aucune difficulté à le croire, mais est-ce que c’est mal? Et je suis persuadé que Mme Viau ne sera pas si surprise de cette sortie publique.
On peut avoir l’opinion qu’on veut de Nadine Viau, mais il faut lui reconnaître qu’elle a toujours parlé d’audace. C’est presque un mantra. Chaque fois qu’on lui parle de développement, notamment économique, ses yeux s’illuminent. En mai 2024, en entrevue avec elle à son retour de Copenhague, elle tenait un discours de ville durable, d’un Belœil dont on peut être fier. Surtout que la phase finale des Bourgs de la Capitale est le dernier projet immobilier d’envergure dans cette ville. Et il faut l’imaginer avec plus d’humanité, disait-elle.
« On ne peut pas laisser l’aménagement du territoire dans les mains de gens qui sont là pour faire des sous, donc il faut qu’on réfléchisse et qu’on travaille avec [les propriétaires et les promoteurs] pour être capables d’avoir une vision fonctionnelle de ce qu’on veut à Belœil », déclarait-elle à notre journal en juillet dernier.
On veut, j’imagine, éviter de nouveaux développements résidentiels en série. Prenons juste Beloeil : les quartiers des premières phases des Bourgs de la Capitale, c’est beau, c’est neuf, c’est bien fait. Mais c’est parfois sans âme. Si vous roulez sur Saint-Jean-Baptiste en direction de la 20, ne regardez pas trop à droite – cela peut devenir hypnotisant tellement les maisons sont toutes pareilles.
Maintenant, est-ce que c’est mal de vouloir imposer un modèle différent aux promoteurs? À vous de décider. Je ne peux pas consulter les chiffres des promoteurs, et peut-être ont-ils raison sur le fond : Belœil doit peut-être rêver un peu moins et ne pas se nourrir de mirages. Une ville moins audacieuse, plus conventionnelle, alors que le marché du logement au Québec est particulièrement difficile depuis quelques années.
Avec leur sortie publique, les trois promoteurs sont peut-être en train d’imposer la question de l’urne.