La Presse a été la première à révéler l’existence de la poursuite, mais L’ŒIL a depuis obtenu copie de la demande introductive d’instance au palais de justice de Montréal. La poursuite vise non seulement Thilliez, mais aussi son éditeur, Fleuve Éditions, et le distributeur canadien du livre, Interforum Canada. Selon la poursuite, le livre de Franck Thilliez ressemble étrangement à Terminal Grand Nord : il se passe aussi au Québec, dans une ville isolée du Grand Nord basée sur Schefferville, et raconte une enquête à la suite d’un meurtre sordide d’une jeune femme. En plus de la prémisse du livre, la poursuite souligne qu’on peut trouver « un nombre important d’emprunts sans équivoque aux œuvres de [Mme Lafortune], et ce, à plusieurs niveaux, notamment des paraphrases, des enjeux des personnages, des nœuds dramatiques, etc. » Les similitudes vont jusqu’aux noms de certains personnages, dont celui d’Angelune, inventé par l’autrice. Selon le document de cour, l’auteur français était bien au courant de l’existence des romans d’Isabelle Lafortune, qu’il a lus et qui ont servi à ses recherches pour son propre polar, même s’il ne les a jamais cités parmi les livres québécois qu’il apprécie.
La poursuite mentionne aussi qu’une coproduction entre la France et le Québec doit créer une série à partir du roman de Thilliez, alors qu’Isabelle Lafortune travaille elle-même depuis des années pour un jour porter Terminal Grand Nord à l’écran. Cette adaptation lui cause ainsi un préjudice supplémentaire puisqu’elle peut nuire à son propre projet.
Après des discussions entre les parties au début de 2025, une mise en demeure a été envoyée par Isabelle Lafortune en juin dernier, demandant indemnisation pour « la contrefaçon de son œuvre ». Comme Franck Thilliez et son équipe n’ont pas donné suite à ses demandes, la poursuite a été déposée au palais de justice de Montréal le 17 septembre dernier. La poursuite demande un montant de 1 225 000 $ aux autres parties impliquées, ce qui inclut les pertes pécuniaires (à la fois causées par la vente du livre et l’adaptation télévisée), l’anxiété causée par la situation, les dommages moraux punitifs et les honoraires extrajudiciaires. Il est possible que ces montants soient revus à la hausse si le processus judiciaire va plus loin.
Franck Thilliez nie
Face à ces accusations, le principal intéressé se défend d’avoir commis du plagiat et « conteste fortement » les accusations de l’autrice belœilloise. « [Si la poursuite va de l’avant,] je ferai naturellement valoir mes droits, car je ne peux accepter que ma réputation et mon intégrité soient ainsi mises en cause », a-t-il notamment fait savoir au journal La Voix du Nord. Dans le même média, Fleuve Éditions ajoute que « ces deux romans n’ont rien de commun, si ce n’est un fait historique parfaitement connu, véritable scandale d’état largement documenté au Canada ».
Pour sa part, Isabelle Lafortune ne pouvait pas commenter davantage le dossier, maintenant entre les mains des tribunaux.