22 février 2023 - 07:00
Procès d’Abraham Leblanc reporté en 2024
La famille de la victime craint l’arrêt des procédures
Par: Denis Bélanger
Abraham Leblanc. Photo gracieuseté

Abraham Leblanc. Photo gracieuseté

La conclusion du procès du Belœillois Abraham Leblanc, accusé d’avoir causé involontairement la mort du nonagénaire Lionel Martineau en 2019, vient d’être reportée en 2024. Une nouvelle désolante aux yeux de la famille de la victime qui craint maintenant que la procédure judiciaire tombe étant donné que la cause aura dépassé les plafonds de durées de procédures établis par l’arrêt Jordan.

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En janvier dernier, il a été déterminé que le procès reprendrait le 5 février 2024. Notons qu’en raison de l’arrêt Jordan, les procédures judiciaires ne peuvent s’étendre au-delà de 30 mois après l’arrestation d’un accusé. Abraham Leblanc a été arrêté le 29 janvier 2020. « J’ai indiqué que les délais pouvaient devenir problématiques si c’était reporté au-delà de l’été », commente Me Marie-Claude Morin, qui représente la Couronne dans le dossier.

De son côté, la famille de M. Martineau est déçue et choquée de la tournure des événements. « Nous sommes victimes de la lourdeur judiciaire. Nous voulons que justice soit faite aussi pour Lionel Martineau et qu’il n’y ait donc pas arrêt des procédures », déclare un des enfants de M. Martineau mandaté pour parler au nom de la famille.

Confusion de dossiers

Le procès a commencé avec la présentation de requêtes le 13 septembre dernier au palais de justice de Saint-Hyacinthe devant le juge Benoît Gariépy. Le procès devait se poursuivre pendant quatre jours dans la semaine du 27 mars 2023.

« À l’été 2022, le juge Gariépy avait indiqué aux deux parties que le procès se déroulerait au printemps 2023. Nous avions noté le tout en croyant que le juge avait des dates disponibles pour ce moment-là. En septembre, à la fin des audiences, la semaine du 27 mars 2023 avait été avancée et ça convenait aux deux parties », ajoute Me Morin.

Selon la Couronne, le juge Benoît Gariépy a toutefois confondu le dossier d’Abraham Leblanc avec celui de David Leblanc et a inscrit les deux dossiers pour les mêmes dates. Le magistrat a donc choisi de repousser celui d’Abraham Leblanc. Aucune explication à cet égard n’a été fournie. Le journal a contacté la Cour du Québec, mais aucun représentant n’a rappelé le journaliste au moment de mettre sous presse.

De son côté, le bureau du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) demeure dans l’attente de retour quant à la possibilité de fixer le procès le plus rapidement possible. « Le DPCP déploie tous les efforts pour mener à terme les procédures judiciaires intentées dans ce dossier », renchérit la porte-parole, Me Audrey Roy-Cloutier.

Pour sa part, le ministre de la Justice et député de Borduas, Simon Jolin-Barrette, avance ne pas pouvoir s’immiscer dans un dossier particulier, car l’horaire des audiences relève entièrement de l’indépendance judiciaire. « Nous sommes très sensibles à ce que peuvent ressentir les personnes victimes qui sont en attente d’un procès. Les personnes victimes doivent pouvoir tourner la page et reprendre le cours de leur vie. C’est une priorité pour moi. »

L’Œil Régional a également tenté de contacter l’avocat d’Abraham Leblanc, Me Martin Latour, mais il n’a pas donné suite à la demande du journaliste de commenter le dossier.

Aucun intervenant dans le dossier n’a soulevé le sujet, mais les juges de la Chambre criminelle et pénale siègent moins de jours depuis septembre 2022 à la suite de la décision de la juge en chef. Les magistrats siègent un jour sur deux , plutôt que deux jours sur trois comme c’était le cas auparavant. Cette décision critiquée par le gouvernement du Québec oblige le DPCP à devoir prioriser les dossiers criminels.

Plus de trois ans après le décès

L’événement ayant entraîné la mort de Lionel Martineau remonte au 26 octobre 2019. Cette journée-là, l’homme âgé de 92 ans promenait son chien dans la rue Jeanne-Mance à Belœil. Son chien aurait marché sur le terrain d’Abraham Leblanc qui s’affairait à monter son abri d’auto. Abraham Leblanc aurait demandé plusieurs fois à M. Martineau de quitter son terrain avec son chien. Il n’appréciait pas la présence de l’animal, car il y avait un enfant à proximité.

Abraham Leblanc aurait dit à M. Martineau d’arrêter et aurait éventuellement poussé l’homme âgé qui s’est barré les pieds et est tombé par la suite sur le trottoir. C’est du moins ce qu’il aurait dit spontanément à un des agents de la Régie intermunicipale de police Richelieu–Saint-Laurent présents sur place. Selon un autre témoin, l’accusé aurait « à peine touché » la victime.

Notons que c’est Abraham Leblanc qui a composé le 911 pour obtenir les services d’urgence. Sur l’enregistrement de l’appel 911, on entend clairement l’accusé aviser Lionel Martineau de ne pas bouger pour éviter d’aggraver sa blessure.  L’accusé avait également sous-estimé l’âge de M. Martineau, le croyant plutôt âgé de la soixante-dizaine.

Lionel Martineau avait été immédiatement conduit dans un centre hospitalier pour des blessures graves et, au cours de cette même journée, Abraham Leblanc avait été arrêté pour voies de fait graves. Il a par la suite été interrogé par des enquêteurs pour finalement être libéré par le biais d’une promesse à comparaître. Deux jours plus tard, soit le 28 octobre, la victime est décédée et c’est à ce moment que l’enquête fut confiée aux enquêteurs des crimes contre la personne de la Sûreté du Québec, toujours en collaboration avec les enquêteurs de la Régie intermunicipale de police Richelieu–Saint-Laurent.

Abraham Leblanc a été finalement arrêté le 29 janvier 2020. En plus de l’accusation d’homicide involontaire, des accusations de voie de fait causant des lésions corporelles se sont ajoutées. M. Leblanc a obtenu par la suite sa remise en liberté avec conditions à respecter et un engagement de 2000 $ sans dépôt. Avant ce malheureux événement, il n’avait aucun antécédent judiciaire.

Rappelons que la peine maximale pour un homicide involontaire est la prison à vie, mais il n’y a pas de peine minimale. Il revient souvent au juge de première instance de déterminer la peine.

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