30 mai 2023 - 12:54
Daphné Huard-Boudreault
La famille poursuit la police pour 1 M$
Par: Denis Bélanger
Daphné Huard-Boudreault. Photo gracieuseté

Daphné Huard-Boudreault. Photo gracieuseté

Le dossier de Daphné Huard-Boudreault, cette jeune femme assassinée par son ex-petit ami Anthony Pratte-Lops le 22 mars 2017 à Mont-Saint-Hilaire, vient d’atterrir à la chambre civile de la Cour du Québec. La famille de la victime a intenté des procédures judiciaires contre la Régie intermunicipale de police Richelieu–Saint-Laurent (RIPRSL) pour notamment des compensations totalisant un peu plus d’un million de dollars. Aucun policier n’est visé directement par l’action.

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La nouvelle a été confirmée lundi par le cabinet représentant la famille, soit Arsenault Dufresne Wee Avocats. « Le cas de Daphné illustre certains mythes et stéréotypes entourant la violence conjugale. Par cette poursuite, la famille de Daphné souhaite recevoir une compensation pour les dommages subis et aider à faire la lumière sur la réalité de la violence conjugale », commente par voie de communiqué Me Virginie Dufresne Lemire. L’avocate avait d’ailleurs indiqué à L’Œil Régional l’automne dernier que la possibilité d’un recours était envisagée.
La poursuite a été déposée au nom du père de la victime, Éric Boudreault, sa belle-mère Claudine Halde, son frère mineur, sa mère Mélanie Huard et sa sœur Léonie Huard-Boudreault. Le dossier sera entendu au palais de justice de Longueuil, puisque le siège social de la RIPRSL est situé à Sainte-Julie, soit à l’extérieur du district judiciaire de Saint-Hyacinthe où a été condamné Anthony Pratte-Lops.
Travail policier
Depuis le jour du drame, le travail des policiers dans cette histoire a été constamment critiqué sur diverses tribunes. Rappelons que quelques heures avant le meurtre, les policiers étaient intervenus auprès de l’accusé sur le lieu de travail de Daphné Huard-Boudreault, mais il n’avait pas été arrêté. La poursuite reprend le thème de la faute policière.
« Selon la famille, les agents de police directement impliqués ont notamment minimisé la gravité du comportement de son ex-conjoint et ont omis de prendre en compte de nombreux éléments afin d’évaluer le niveau de dangerosité de la situation, entre autres le fait que Daphné faisait face à du harcèlement marqué de la part de son ex-conjoint dans les heures précédant son assassinat », renchérit Me Dufresne Lemire.
Les poursuivants estiment aussi que les agents de la Régie ont commis une faute en exigeant que des menaces ou des blessures physiques constatées sur la victime soient nécessaires pour enclencher l’application des directives internes en matière de violence conjugale. Toujours selon la poursuite, le blâme revient à l’organisation pour ne pas avoir rectifié le tir.
« Ces exigences supplémentaires ont engendré une réduction du champ d’application de ces directives et ont directement contribué au sort tragique de Daphné. La famille reproche également à la Régie d’avoir été au fait de l’interprétation et de l’application erronées des directives en matière de violence conjugale par ses agents, et ce, sans qu’aucune correction ne soit apportée. »
De son côté, la RIPRSL n’a pas voulu commenter la nouvelle pour l’instant.

En attente d’un autre procès
La RIPRSL doit aussi se défendre dans ce dossier contre le Commissaire à la déontologie policière. Dans ce cas-ci, ce sont les agents Martin Fisette et Brigitte Légaré qui sont concernés. Ce sont les deux policiers qui ont rencontré Daphné Huard-Boudreault au poste de police de Belœil quelques heures après l’événement du matin. On leur reproche d’avoir commis une faute en ne procédant pas immédiatement à l’arrestation d’Anthony Pratte-Lops. Notons que la jeune femme, qui ne souhaitait pas porter plainte, a quitté le poste de police sans attendre l’agente Légaré pour aller récupérer ses effets personnels à l’appartement qu’elle partageait avec le prévenu. L’agente s’est empressée de la rattraper. Elle est arrivée au logement après que le meurtre ait été commis.
Les audiences devant le comité de déontologie ont eu lieu en mars et en septembre 2022. Certaines informations entendues pendant ce processus ont d’ailleurs été reprises pour la poursuite civile.
La juge administrative du Comité de déontologie a rendu sa décision le 5 avril et a statué que les policiers n’avaient pas commis les fautes reprochées. Le commissaire à la déontologie policière a décidé au début du mois de porter la décision en appel.

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