L’institution détenait son agrément depuis 2019. Cette reconnaissance était valide pour une période de cinq ans. « C’est une perte de reconnaissance pour nous, qui était évidemment non souhaitée. Cela n’aura toutefois aucun impact sur le financement. Nous allons être en mesure de l’obtenir à la prochaine ouverture du processus d’agrément », souligne la directrice Chantal Millette. Le ministère continuera de plus à offrir son accompagnement à La Maison autochtone.
Notons que cette nouvelle survient alors que, de son côté, le Musée des beaux-arts de Mont-Saint-Hilaire a enfin obtenu son agrément auprès du ministère après quelques tentatives.
Le ministère n’a pas voulu révéler immédiatement les raisons qui ont mené à la perte de l’agrément ni confirmer des éléments avancés par les parties concernées. L’ŒIL a dû faire une demande d’accès à l’information et est en attente de la réponse.
« Les membres d’un comité composé d’experts en muséologie externe de la fonction publique s’appuient sur le guide des exigences pour procéder à l’analyse rigoureuse des nombreux documents qui constituent un dossier d’agrément. Pour obtenir un agrément (ou le conserver), l’institution muséale doit se conformer aux critères d’admissibilité et à l’ensemble des exigences en matière de gouvernance, de gestion des ressources financières, humaines et physiques, de services aux différentes clientèles, de gestion et de conservation des collections, de diffusion et d’éducation. », indique néanmoins le département des communications du MCCQ par voie de courriel.
La Maison autochtone affirme que la principale raison de la perte de cet agrément est l’absence de la signature d’un bail au moment du dépôt du dossier en février. « Il y a d’autres éléments, mais le principal est le bail », renchérit Chantal Millette. Le président du conseil d’administration du Musée, Richard Ruest, a énuméré d’autres raisons secondaires. « Les autres raisons comme les copies de contrats de nos partenaires, la liste de nos catalogues, etc., sont des futilités que nous aurions pu fournir sur simple demande à la fonctionnaire responsable en région de transférer les dossiers à Québec. »
De son côté, la Ville de Mont-Saint-Hilaire a un point de vue plus nuancé sur la situation.
« Le bail n’est pas le seul critère imposé par le ministère. Certes, la situation relative au bail peut avoir un impact. C’est dans cet esprit que la Ville a déjà proposé au conseil d’administration de La Maison autochtone et au ministère une rencontre tripartite afin de rapidement collaborer tous ensemble dans nos champs de compétence respectifs dans le but d’établir des pistes de solutions permettant de retrouver l’agrément », répond la porte-parole de la Ville, Pascale Guilbault.
La Maison autochtone refuse de donner des disponibilités pour une telle rencontre, estimant que la Ville fait de l’ingérence dans un dossier qui ne la concerne pas.
Le ton monte
Bien que la Maison n’ait pas signé de bail, ce dernier a été tacitement renouvelé 10 jours après l’échéance, conformément aux dispositions du Code civil. Le montant du bail actuel de La Maison autochtone correspond, selon la Ville, à 30 % de la valeur locative au marché, soit 75 000 $. Il s’agit donc d’un bail à trois versements égaux totalisant 22 500 $ annuellement. « La Ville permet à La Maison autochtone de bénéficier d’un allègement, dans le cas présent à une hauteur de 70 %, tout comme les organismes reconnus dans le cadre de la Politique de soutien et de reconnaissance des organismes. C’est donc 72 500 $ que la Ville remet annuellement dans le cadre de cette subvention », ajoute Pascale Guilbault.
La Ville a présenté différentes propositions de modifications au bail actuel, dont deux propositions officielles en février dernier qui ont été refusées par l’organisme. « La Ville en a tout récemment proposé une bonification en échange de l’atteinte de différents objectifs. D’ailleurs, la Ville proposait une subvention afin que La Maison autochtone soit autonome dans l’opération et l’entretien régulier du bâtiment pour qu’elle puisse y atteindre les standards de qualité muséale qu’elle souhaite. »
Le président du conseil d’administration de La Maison autochtone, Richard Ruest, explique qu’il est hors de question pour l’organisme de « reprendre la bâtisse ». M. Ruest se montre très émotif dans une missive envoyée au journal dans laquelle il adresse de nombreux reproches à la Ville, qui aurait commis plusieurs gestes « nuisibles » à son endroit. Le bénévole à La Maison autochtone estime voir dans cette situation une forme de racisme.
« Nous revenons plusieurs années en arrière. Le musée allochtone (Musée des beaux-arts, qui a signé une entente en janvier) reçoit plus d’argent et obtient son agrément. Nous, le musée autochtone, on reçoit moins d’argent et on vient de perdre notre agrément. Je vais aller chercher des appuis pour dénoncer la situation. »
Le Conseil des Abénakis d’Odanak a même envoyé la semaine dernière une lettre au maire de Mont-Saint-Hilaire, Marc-André Guertin, lui demandant d’expliquer la disparité des budgets entre les deux musées.
« Vos déclarations sont en contradiction avec les propositions décourageantes que vous faites, tant en matière de bail que de soutien financier. Il semble que vous ne réalisiez pas pleinement l’honneur que représente la présence, dans votre municipalité, du seul musée multi-nations au pays dédié aux échanges, au partage et à la réconciliation », écrivent le chef Rick O’Bomsawin et le conseiller Jacques T. Watso.
L’Œil Régional a contacté Marc-André Guertin pour obtenir sa réaction sur la déclaration de M. Ruest alléguant du racisme dans ce dossier. « C’est une affirmation totalement gratuite et non fondée. Il est grand temps qu’on se parle », a-t-il répondu.