Cette nouvelle réglementation concernant un tronçon de 20 km de la rivière Richelieu devait entrer en vigueur au printemps ou à l’été 2022, avec une application possible en 2023, le temps d’installer l’affichage et les bouées nécessaires. Cette réglementation, approuvée par le Bureau de la sécurité nautique et proposée par le Conseil du Trésor, se serait traduite par une limite de vitesse de 10 km/h et par une interdiction du wakeboard sur la partie visée de la rivière, qui longe les municipalités de Saint-Antoine, Saint-Charles, Saint-Marc et Saint-Denis-sur Richelieu.
Mais l’annonce a eu l’effet d’une bombe dans le milieu du nautisme. Nautisme Québec, plusieurs propriétaires de marinas et plusieurs propriétaires de bateaux se sont mobilisés pour s’opposer à la nouvelle réglementation et aimeraient une autre proposition, moins « draconienne ». Les opposants critiquent aussi le processus de consultation qui a mené au dépôt de la demande de limite de vitesse et de l’interdiction du wakeboard.
Processus
En 2019, le député fédéral de Pierre-Boucher–Les Patriotes–Verchères, Xavier Barsalou-Duval, en compagnie des quatre maires des municipalités riveraines, avait déposé un rapport au Bureau de la sécurité nautique (BSN) qui demandait qu’une série d’actions sur la rivière soient posées concernant la vitesse. Le document de 140 pages découlait d’une série de consultations publiques tenues en 2017 et d’une pétition de 500 noms.
La limite de vitesse de 10 km/h est toutefois une recommandation provenant d’un comité composé de navigateurs, créé à la suite du dépôt du rapport. Son mandat était notamment de répondre aux questions du BSN.
C’est cette limite de vitesse, aussi acceptée par les anciens maires des quatre municipalités, qui dérange les opposants. Toutefois, plusieurs organismes ont donné leur appui à cette nouvelle réglementation, notamment la Fondation Rivières, l’Association des riverains et amis du Richelieu, le Conseil régional de l’environnement de la Montérégie et le Comité de concertation et de valorisation du bassin de la rivière Richelieu. Les partisans en faveur de la limite de vitesse soulignent que la nouvelle réglementation aurait des effets bénéfiques concernant l’érosion des berges, la tranquillité des riverains, la sécurité nautique, le partage de la rivière et la protection de l’habitat du chevalier cuivré, une espèce de poisson en danger.
Du côté des opposants, on admet qu’il y a place à l’amélioration pour la cohabitation sur la rivière sans une réduction de vitesse trop sévère. « On veut une alternative et voir comment on peut s’entraider pour une situation win-win », dit Patrick Picard, de la marina Saint-Mathias. Il prétend toutefois que « l’érosion des berges, c’est trop facile comme argument » et que l’industrie du nautisme n’a pas autant d’impact qu’on le pense sur le phénomène.
Selon le nouveau maire de Saint-Marc-sur-Richelieu, François Berthiaume, c’est au moment du dévoilement de cette recommandation par le comité que le débat actuel aurait dû avoir lieu. « Il n’y a pas eu de consultation. C’est là où le bât blesse. Si les gens avaient eu l’occasion de s’exprimer, probablement que les réactions vives que nous avons en ce moment, on les aurait eues à l’époque et on aurait pu modeler le contenu du règlement. »
Pierre Hétu, riverain de Saint-Charles-sur-Richelieu, prétend même que tout ce débat aurait pu être évité si Transport Canada avait mieux respecté son propre cadre de procédure. Dans son Guide des administrations locales, Transports Canada exige que les demandeurs d’une nouvelle réglementation sur l’eau obtiennent d’abord « le soutien de la collectivité » et tentent « d’explorer des mesures alternatives ». Selon M. Hétu, tout ça n’a pas été bien fait.
Transports Canada veut un consensus
C’est finalement Transports Canada qui a mis un peu d’eau dans le gaz en exigeant un nouveau consensus autour de la future réglementation. Les quatre nouveaux maires élus le 7 novembre dernier se sont donnés jusqu’à la mi-décembre pour se prononcer et offrir le même appui. « La réglementation [doit] être adoptée telle quelle, autrement, il faudrait procéder à un nouveau dépôt de dossier » a fait savoir le bureau de Xavier Barsalou-Duval.
Avant de rendre leur décision définitive, chacun des quatre conseils municipaux tiendra des assemblées citoyennes sur le sujet. Au moment d’écrire ces lignes, les dates des consultations n’avaient pas toutes été annoncées.
Notons que même avec un appui favorable des maires, l’entrée en vigueur de la réglementation n’aurait pas lieu avant 2024.