27 octobre 2025 - 05:00
Des jeunes autour de la table
La politique municipale vue par la relève
Par : L'Oeil Régional
Xavier Lafleur, Antoine Barrette, David Morin et Julien Tardif ont accepté de discuter en table ronde de l'implication jeunesse en politique municipale avec L'Œil Régional.
Photo François Larivière | L'Œil Régional ©

Xavier Lafleur, Antoine Barrette, David Morin et Julien Tardif ont accepté de discuter en table ronde de l'implication jeunesse en politique municipale avec L'Œil Régional.

Xavier Lafleur – Candidat à Belœil.
Détenteur d’un baccalauréat en relations internationales, Xavier Lafleur s’est d’abord impliqué en politique municipale un peu par hasard, en 2021, au sein du parti Belœil, c’est nous!, après un contact avec le chef Luc Cossette, À l’époque, il débutait son bac et voyait déjà un parallèle entre les dynamiques locales et les grands enjeux internationaux. « Le municipal, c’est beaucoup de contacts, ça touche directement les gens », dit le jeune candidat de 23 ans. Cette année, après avoir d’abord refusé de se présenter, il a finalement accepté d’être candidat à la suite d’un désistement. Il prend son rôle très au sérieux : « Je voulais briser le stéréotype qu’il faut payer des taxes pour s’intéresser à la politique municipale. »
Photo François Larivière | L’Œil Régional ©

Xavier Lafleur – Candidat à Belœil. Détenteur d’un baccalauréat en relations internationales, Xavier Lafleur s’est d’abord impliqué en politique municipale un peu par hasard, en 2021, au sein du parti Belœil, c’est nous!, après un contact avec le chef Luc Cossette, À l’époque, il débutait son bac et voyait déjà un parallèle entre les dynamiques locales et les grands enjeux internationaux. « Le municipal, c’est beaucoup de contacts, ça touche directement les gens », dit le jeune candidat de 23 ans. Cette année, après avoir d’abord refusé de se présenter, il a finalement accepté d’être candidat à la suite d’un désistement. Il prend son rôle très au sérieux : « Je voulais briser le stéréotype qu’il faut payer des taxes pour s’intéresser à la politique municipale. » Photo François Larivière | L’Œil Régional ©

Antoine Barrette – Candidat à la mairie de McMasterville
À 22 ans, Antoine Barrette habite encore chez sa mère et ne paie pas de taxes municipales, mais cela ne l’empêche pas de viser haut : il tente sa chance à la mairie de McMasterville. Étudiant en science politique et très intéressé par les questions de l’administration, il s’intéresse particulièrement à la gestion municipale et dit assister régulièrement aux séances publiques de son conseil. Il affirme vouloir porter une voix plus jeune et inclusive : « Les jeunes sont sous-représentés. On parle souvent d’enjeux de baby-boomers, mais ça ne veut pas dire que, par mon âge, je n’ai pas les compétences. » Il veut s’attaquer à la crise du logement, améliorer le transport collectif et renforcer l’aide alimentaire locale.

Antoine Barrette – Candidat à la mairie de McMasterville À 22 ans, Antoine Barrette habite encore chez sa mère et ne paie pas de taxes municipales, mais cela ne l’empêche pas de viser haut : il tente sa chance à la mairie de McMasterville. Étudiant en science politique et très intéressé par les questions de l’administration, il s’intéresse particulièrement à la gestion municipale et dit assister régulièrement aux séances publiques de son conseil. Il affirme vouloir porter une voix plus jeune et inclusive : « Les jeunes sont sous-représentés. On parle souvent d’enjeux de baby-boomers, mais ça ne veut pas dire que, par mon âge, je n’ai pas les compétences. » Il veut s’attaquer à la crise du logement, améliorer le transport collectif et renforcer l’aide alimentaire locale. Photo François Larivière | L’Œil Régional ©

David Morin – Élu à Mont-Saint-Hilaire
Élu pour un second mandat à Mont-Saint-Hilaire, David Morin a fait ses débuts en politique municipale à seulement 23 ans. Titulaire d’un baccalauréat par cumul en sciences sociales et en urbanisme, il s’est d’abord impliqué dans les causes environnementales, notamment au sein du comité Ville équitable et à travers une pétition demandant plus d’actions contre les changements climatiques. Son implication citoyenne l’a mené naturellement vers la politique active : « Je demandais, je revendiquais. À un moment, je me suis dit : si je veux que ça change, je dois m’impliquer. » Inspiré par d’autres jeunes élus, il croit que le municipal reste le palier où l’action concrète est la plus possible. Même si aujourd’hui, sa réalité a changé, notamment en devenant propriétaire d’un condo, il a offert sa perspective d’un premier mandat.��

David Morin – Élu à Mont-Saint-Hilaire Élu pour un second mandat à Mont-Saint-Hilaire, David Morin a fait ses débuts en politique municipale à seulement 23 ans. Titulaire d’un baccalauréat par cumul en sciences sociales et en urbanisme, il s’est d’abord impliqué dans les causes environnementales, notamment au sein du comité Ville équitable et à travers une pétition demandant plus d’actions contre les changements climatiques. Son implication citoyenne l’a mené naturellement vers la politique active : « Je demandais, je revendiquais. À un moment, je me suis dit : si je veux que ça change, je dois m’impliquer. » Inspiré par d’autres jeunes élus, il croit que le municipal reste le palier où l’action concrète est la plus possible. Même si aujourd’hui, sa réalité a changé, notamment en devenant propriétaire d’un condo, il a offert sa perspective d’un premier mandat. Photo François Larivière | L’Œil Régional ©

Julien Tardif – Ancien candidat à Belœil
Julien Tardif ne se présente pas cette année, mais il a déjà tenté sa chance aux élections municipales de 2021, alors qu’il n’avait que 19 ans. C’est un discussion avec Karim-André Laz et Nadine Viau, du parti Oser Belœil, qui l’avait convaincu de tenter sa chance. Diplômé en administration publique de l’UQAM, il étudiait alors à l’Université d’Ottawa en relations internationales. C’est à travers ses travaux sur l’accès à l’éducation et les conditions de vie qu’il a réalisé l’importance du palier local. « On peut bien parler de diplomatie à l’ONU, mais ce sont les réalités locales qui décident si tu as accès à une bonne école », explique-t-il. Militant de longue date, notamment sur les questions du climat, il voit la démocratie comme un engagement « qui ne s’arrête pas au bulletin de vote ».��

Julien Tardif – Ancien candidat à Belœil Julien Tardif ne se présente pas cette année, mais il a déjà tenté sa chance aux élections municipales de 2021, alors qu’il n’avait que 19 ans. C’est un discussion avec Karim-André Laz et Nadine Viau, du parti Oser Belœil, qui l’avait convaincu de tenter sa chance. Diplômé en administration publique de l’UQAM, il étudiait alors à l’Université d’Ottawa en relations internationales. C’est à travers ses travaux sur l’accès à l’éducation et les conditions de vie qu’il a réalisé l’importance du palier local. « On peut bien parler de diplomatie à l’ONU, mais ce sont les réalités locales qui décident si tu as accès à une bonne école », explique-t-il. Militant de longue date, notamment sur les questions du climat, il voit la démocratie comme un engagement « qui ne s’arrête pas au bulletin de vote ». Photo François Larivière | L’Œil Régional ©

Ils sont jeunes, ne sont pas propriétaires d’une maison et ne paient donc pas de taxes municipales. Ils n’ont pas d’enfants, et certains sont encore aux études. Pourtant, ils sont animés par le même désir de s’impliquer en politique municipale. Pourquoi? À quelques jours du scrutin, nous les avons invités autour de la table pour en discuter.

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Pourquoi le municipal?

Autour de la table, la réponse est unanime. La politique municipale, c’est avant tout une affaire de proximité. Julien y voit « une question d’opportunité », une fenêtre qui s’est ouverte à un moment précis. Il raconte qu’il n’aurait peut-être jamais sauté le pas sans qu’on l’approche. « Je me serais pas présenté si on ne m’avait pas contacté. J’avais certaines réticences avec le milieu de la politique, surtout la partisanerie et la polarisation. » Ce qui l’a convaincu, c’est la possibilité d’agir localement, notamment sur les questions du climat.

Le climat demeure un fil conducteur dans leurs discours. « Oui, le climat, c’est un gros enjeu », ajoute Antoine, qui fait le lien avec le dossier Northvolt à McMasterville. Pour lui, le municipal, c’est la proximité, l’occasion d’aller à la rencontre directe du citoyen : « J’ai regardé les ailes jeunesse des partis provinciaux, mais c’était trop lèche-cul; tu obéis au boss. Là, au moins, tu peux parler aux gens, les écouter, prendre un café avec eux, comme le maire actuel le faisait. » Et puis, à McMasterville, rappelle-t-il, « ça fait 28 ans qu’il n’y a pas eu d’élection ». Donc oui, aussi une question de fenêtre d’opportunité.

David renchérit sur la proximité. « Il y a les conseils chaque mois, les comités citoyens. On va plus en profondeur sur les enjeux. En campagne, on rencontre les gens dans leur quartier. »

Xavier partage cette vision, mais y ajoute une réflexion plus théorique, en lien avec sa formation académique. « Je termine ma maîtrise en science politique, et j’ai eu des cours sur la participation citoyenne. Seulement 40 % des gens votent, et combien lisent le journal? La proximité, c’est aussi le porte-à-porte. Les gens ne s’y intéressent pas tant que ça [à la politique municipale], mais quand tu leur parles du terrain de basket ou du déneigement, ils ont tous une opinion. »

S’il aime la politique provinciale, Xavier abonde dans le même sens qu’Antoine concernant la liberté qu’offre le municipal. « Dans les ailes jeunesse, on est dans la logique du chef. Au municipal, on peut se permettre d’être en désaccord, d’amener de nouvelles idées. Tu connais les gens avec qui tu te présentes. »

Julien pense que, malheureusement, les gens voient la politique municipale comme une ligue de garage, moins importante que la politique nationale. « Ils ne se rendent pas compte à quel point ça les touche.

Le faux débat de l’âge

À leur grande surprise (et la nôtre), les quatre jeunes confirment n’avoir jamais été confrontés à leur âge en campagne. « Personne ne m’a challengé là-dessus, affirme Antoine. Au contraire, les gens me disaient qu’ils étaient contents de voir un jeune se lancer. J’avais même préparé un speech au cas où, mais je n’en ai pas eu besoin. »

Xavier fait le même constat. « Oui, je suis jeune, mais pas seul. Il y a toute une équipe autour de moi, des gens compétents, un directeur général. Les électeurs sont contents de voir une relève. Et je me présente dans le quartier où j’ai grandi. Ça permet de belles rencontres. »

David, pour sa part, parle d’une « bienveillance générale », peut-être liée au contexte post-pandémique de 2021. « Ça ne voulait pas dire qu’ils allaient voter pour nous, mais les gens étaient contents de voir un jeune qui a la tête sur les épaules. » Dans son porte-à-porte pour sa deuxième campagne, son âge n’était plus un enjeu, surtout qu’il avait maintenant quatre ans d’expérience comme élu.

L’apport des jeunes à la politique municipale

Quand on leur demande ce qu’ils pensent apporter de différent à leur ville, ils parlent rapidement de mobilité. David précise que cet enjeu, il l’a littéralement vécu sur son vélo. « J’ai grandi à Mont-Saint-Hilaire. J’ai parcouru ses rues sur mon bicycle comme ado. J’ai donc vu les enjeux avec un regard différent. Et j’ai pris la 200 tous les jours pour aller au cégep », dit-il, provoquant un fou rire autour de la table à la mention de la ligne d’autobus entre ​​Saint-Hyacinthe et Longueuil empruntée par tous!

Julien évoque de son côté la crise du logement. « Comme jeune, on la voit, on la vit. « C’est une crise d’intimité. Quand tu restes chez tes parents, c’est difficile de développer ton autonomie. Je pense que les jeunes ont une perspective différente de la question, un impératif de régler cet enjeu que tu n’as pas si tu es propriétaire. La famille nucléaire, si tu veux la convaincre, tu dois sortir ton petit violon et parler de leurs enfants! »

« Oui, on promet des logements abordables, mais abordables pour qui? ajoute Antoine. Les mesures actuelles ne sont pas adaptées. Nos parents pouvaient acheter une maison. Nous, non. » Même un condo, « c’est hors de prix. »

Malgré leur âge, leurs enjeux peuvent parler aux plus vieux. Xavier évoque une rencontre avec les Chevaliers de Colomb : « Ce sont des gens plus âgés, à la retraite, mais ils se sentent eux aussi peu écoutés. » David ajoute que les aînés qui veulent quitter leur maison mais rester dans leur ville vivent le même problème que les jeunes et doivent souvent quitter leur milieu. « Les logements ne sont pas plus abordables. »

La relève

À un jeune qui hésite à se lancer en politique, Antoine n’a qu’un conseil : « Vas-y. Au pire, ça va dans ton CV. Tu n’as rien à perdre. »

Julien nuance toutefois l’idée de se présenter sans se questionner. « Il y a des gens qui font de la politique pour faire de la politique. Ce n’est pas intéressant, d’un point de vue social. Il faut savoir pourquoi tu te présentes. Te dois te rebrancher sur le “pourquoi” tu fait les choses et te protéger des powertrips. » Il rappelle aussi que l’engagement citoyen ne se limite pas aux campagnes électorales, et que plusieur organismes communautaires, par exemple, cherchent des jeunes administrateurs. « Ils ont besoin de notre perspective. »

David, qui a eu la chance de faire un premier mandat, veut toutefois dire aux aspirants élus que le rôle est exigeant. « Ça prend une partie de ton espace mental, c’est constant. Ce n’est pas évident de concilier ça avec les études ou un travail. Mais c’est gratifiant. J’ai commencé avec une pétition, et aujourd’hui on a un plan climat municipal. C’est concret, tu vois les résultats. »

La jeunesse et le scrutin de novembre

Comment convaincre les jeunes d’aller voter? C’est la question la plus difficile, et les quatre confirment que c’est difficile de leur parler. « Beaucoup sont inscrits ici sur la liste électorale, mais ils étudient – et vivent – à Sherbrooke ou à Montréal, illustre Xavier. Ils ne vivent pas vraiment la réalité de leur ville d’origine. Et il y a un manque d’information. Les gens ne savent même pas comment fonctionne un budget municipal. Au provincial ou au fédéral, on se fait gaver d’infos, mais pas au municipal. »

Il croit qu’il faut multiplier les occasions d’écoute, peut-être à travers un conseil jeunesse, par exemple. « Plus on sollicite ton opinion, plus tu sens qu’elle compte. »

David souligne aussi que la méconnaissance est un obstacle. « Quand je parle aux jeunes, je leur demande : tu prends le train? la 200? Ce sont des enjeux municipaux. Les villes ont un rôle à jouer. »

Julien, lui, voit le problème de manière plus structurelle. Les jeunes ne se sentent pas concernés, et il n’y a pas assez d’éducation à la citoyenneté. « Même si on crée un comité jeunesse, ça ne réglera pas tout. Il faut qu’ils se sentent inclus, qu’on parle avec eux de sujets concrets. Si ça ne fait pas partie de leur quotidien, ils ne s’y intéresseront pas. » Il parle aussi du défi de l’accès à l’information. « L’actualité n’est plus sur Meta, où les jeunes s’informent. Quand j’étais plus jeune, je regardais RAD de Radio-Canada sur mes réseaux. Leurs contenus venaient à moi. »

Devant cette fatalité, les quatre participants concluent tout de même que le palier municipal est le premier lieu où l’on peut réellement changer les choses. Ils en parlent sans cynisme, conscients des limites du système, mais convaincus de l’importance de tenter encore et toujours d’impliquer les jeunes dans la politique locale.

Avec la collaboration d’Eloïc Potel.

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