25 juin 2024 - 05:00
Le choix du Bedeau
Par: Vincent Guilbault
Vincent Guilbault

Vincent Guilbault

Doit-on accepter la destruction de la maison du Bedeau pour la remplacer par une nouvelle bâtisse afin d’y accueillir un restaurant, ou doit-on forcer les nouveaux propriétaires de cette maison jaune située dans le Vieux-Belœil à la rénover?

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À la lumière des informations qui me sont disponibles, il appert que la démolition est l’option qui s’impose.

Avant de conclure, reconnaissons tous ensemble l’importance patrimoniale de cette maison qui, même si elle n’est pas citée patrimoniale, a tout de même une importance historique. Le conseil local du patrimoine, la Fédération Histoire Québec et notre société d’histoire, via notamment l’expert en patrimoine bâti Pierre Gadbois, nous rappellent que cette maison au style « vernaculaire états-unien », construite vers 1890, possède « une valeur historique indéniable qu’il ne faut pas perdre au Vieux-Belœil », rapportait notre journaliste dans la dernière livraison de L’ŒIL. La maison du Bedeau a abrité tous les sacristains de la paroisse Saint-Matthieu pendant 140 ans. Devant la demande de démolition, les partisans du patrimoine proposent plutôt une restauration.

Ils ont bien sûr raison.

Mais les nouveaux propriétaires de la maison, les mêmes propriétaires que le restaurant Janick, voisin du bâtiment, ont aussi raison. L’état de la maison est lamentable et son état de dégradation impose une démolition, surtout si on veut respecter les normes de sécurité nécessaires pour l’ouverture d’un restaurant. Au moment d’écrire ces lignes, les élus penchaient donc vers cette option, mais un revirement était toujours possible. Une décision difficile, certes, et qui semble aller à l’encontre du discours des élus de vouloir préserver le patrimoine bâti. Mais dans le réel, la situation est plus complexe que d’opposer l’histoire au contemporain; et les élus ne sont quand même pas responsables de la dégradation de la maison.

En fait, tout découle encore une fois du même point : il est difficile de forcer les propriétaires d’une maison à saveur patrimoniale d’en prendre soin. Depuis 2017 au moins, les élus de Belœil disent à la population qu’elle souhaite voir moins de dossiers de démolition aboutir devant le conseil municipal.

La Ville s’est même dotée d’un règlement en 2022 pour citer plusieurs maisons du Vieux-Belœil, règlement qui a toutefois été accueilli avec une forte résistance de la part des propriétaires des maisons visées. La Ville, devant le tollé, avait permis à des propriétaires de retirer leur maison de la liste.

À la fin, tout repose donc sur les épaules des propriétaires. Et à Belœil, nous avons vu beaucoup de maisons laissées à l’abandon pour les rendre irrécupérables et imposer une démolition incontournable. Je ne dis pas que c’est ce qui est arrivé avec la maison du Bedeau, car l’ancienne propriétaire, en entrevue avec L’ŒIL en 2018, clamait vouloir la préserver, même si elle devait à l’époque effectuer des travaux d’envergure très coûteux, dont le remplacement de la toiture, des fenêtres et du revêtement extérieur.

Il semble donc que nous n’ayons toujours pas trouvé la formule idéale pour préserver notre patrimoine bâti. Et à moins d’un revirement, la maison du Bedeau disparaîtra et servira d’exemple dans le futur pour discuter de l’importance d’être proactif afin d’éviter la disparition du patrimoine. Tristement, bien sûr.

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