6 mars 2024 - 07:00
Northvolt
Le gouvernement vient expliquer le projet
Par: Vincent Guilbault
Sur la photo, du ministère de l’Économie et de l’Innovation : Gabriel Audet, directeur de la métallurgie et des produits industriels, Stéphane Pigeon, directeur des terrains et des infrastructures industriels et Nicolas Martin, directeur territorial Montérégie, Estrie et Centre du Québec. Du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs : Stéfanos Bitzakidis, directeur général de l’analyse et de l’expertise de la Montérégie, Ian Courtemanche, directeur général de l’évaluation environnementale et stratégique et Jean-François Ouellet, directeur de la gestion de la faune, de l’Estrie, de Montréal, de la Montérégie et de Laval. Pour le ministère des Transports et de la Mobilité durable : Pascal Dansereau, agent de recherche en planification socio-économique et Fadi Moubayed, directeur général principal de la région métropolitaine de Montréal. Photo L’Œil Régional

Sur la photo, du ministère de l’Économie et de l’Innovation : Gabriel Audet, directeur de la métallurgie et des produits industriels, Stéphane Pigeon, directeur des terrains et des infrastructures industriels et Nicolas Martin, directeur territorial Montérégie, Estrie et Centre du Québec. Du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs : Stéfanos Bitzakidis, directeur général de l’analyse et de l’expertise de la Montérégie, Ian Courtemanche, directeur général de l’évaluation environnementale et stratégique et Jean-François Ouellet, directeur de la gestion de la faune, de l’Estrie, de Montréal, de la Montérégie et de Laval. Pour le ministère des Transports et de la Mobilité durable : Pascal Dansereau, agent de recherche en planification socio-économique et Fadi Moubayed, directeur général principal de la région métropolitaine de Montréal. Photo L’Œil Régional

Huit représentants du gouvernement sont venus à la rencontre des citoyens pour répondre à leurs questions concernant le projet de Northvolt, les 28 et 29 février, à McMasterville et Saint-Basile-le-Grand. L’Œil Régional a assisté à la rencontre à McMasterville, qui s’est tenue devant une centaine de citoyens et d’élus municipaux pendant plus de trois heures.
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Dans la première partie de la présentation, qui s’est étirée pendant environ une heure, les représentants des trois ministères (Économie, Environnement et Transports) ont présenté les différents éléments concernant l’implantation de l’usine sur le terrain de Saint-Basile. En tant que fonctionnaires, ils ont évité toutes les questions du public à saveur politique, même si plusieurs opposants au projet ont pris la parole pour manifester leur mécontentement.

Du côté du ministère de l’Économie et de l’Innovation, le directeur des terrains et des infrastructures industriels, Stéphane Pigeon, a justifié le choix du site par Northvolt. « Quand une entreprise nous demande au ministère ou à Investissement Québec d’identifier un site, ils nous arrivent avec une liste de critères. » Dans le cas de Northvolt, dit-il, l’entreprise nécessite un terrain d’au moins 170 hectares (317 terrains de football américain), qui se trouve en zonage industriel et possède un accès ferroviaire pour diminuer l’accès au camionnage. L’entreprise exigeait une capacité énergétique « à temps » pour démarrer la production en 2026. Finalement, l’entreprise voulait se trouver près d’un bassin de main-d’œuvre, et donc d’une population de 1 million de personnes. Selon M. Pigeon, on trouve 270 sites industriels au Québec, mais seulement 16 possèdent 170 hectares ou plus, et un seul site de cette taille répond aux autres critères, soit celui situé à Saint-Basile et McMasterville.

Concernant l’accès au site, le ministère a mis sur pied un bureau de projet, géré par les deux municipalités concernées, pour gérer les accès temporaires et permanents au site. La firme Génipur a obtenu le mandat, par appel d’offres, de réaliser les plans pour une voie d’accès temporaire d’une durée de 5 ans, dont le chantier doit débuter d’ici la fin de l’été 2024. Cet accès sera localisé sur la voie d’accotement de la 116, en direction est (vers Belœil), sur une distance d’un peu plus de 700 mètres. Un passage à niveau sera construit par le CN pour permettre aux véhicules d’enjamber le chemin de fer.

Pour la phase de construction de Northvolt, M. Pigeon prédit un impact sur la circulation. Dans une étude réalisée en 2022, on dénombre 24 000 mouvements de véhicules par jour (un mouvement = un aller) vis-à-vis du futur campus. Pendant la phase de construction, M. Pigeon estime à environ 1600 le nombre de mouvements supplémentaires, soit une hausse quotidienne de 7 %. Pour diminuer les irritants, l’entreprise et les fournisseurs doivent tenter d’accéder au site en dehors des heures de pointe.

Pour le moment, les camions utilisent la route 223, qui permet le transport de marchandises seulement en circulation locale. Il souligne aussi que le ministère est en pourparlers avec un propriétaire pour utiliser une partie de son terrain, sur le chemin des Trente, à Saint-Basile-le-Grand, pour permettre aux camions de réduire leur présence sur la 223.

Au cours des prochaines semaines, un premier appel d’offres sera lancé pour un accès permanent, toujours sur la 116. Une étude sera réalisée pour déterminer l’impact de la circulation une fois l’usine en fonction, notamment les besoins en déplacement de camion, en transport actif ou en transport collectif. L’étude permettra aussi de connaître les impacts d’une hausse de déplacements sur la 116 dans la périphérie de l’usine et sur les routes et municipalités avoisinantes.

En parallèle, des travaux d’asphaltage sont prévus sur la route 116 à Mont-Saint-Hilaire et Mont-Saint-Bruno pour 2024 et 2025. Des projets de réfection de la 223 entre la 112 et Bernard-Pilon sont aussi prévus, mais aucun échéancier n’a été présenté.

Environnement

Le directeur général de l’analyse et de l’expertise de la Montérégie pour le ministère de l’Environnement, Stéfanos Bitzakidis, a souligné que son rôle était d’analyser les demandes d’autorisation et « de s’assurer que les activités autorisées sont acceptables et conformes aux exigences environnementales du Québec » sur le site de Northvolt.

Il a rappelé que le site visé a accueilli des activités industrielles de 1878 à 1999, notamment de fabrication d’explosifs et d’engrais chimique.« Pendant plus de 100 ans, nous avons eu des activités industrielles et des sols contaminés. Les sols ont été contaminés suffisamment pour atteindre des niveaux compatibles avec un usage industriel. » Toutefois, il souligne que l’absence d’activité depuis 1999 à cet endroit fait en sorte que « la nature a repris ses droits ». On y retrouve des marais, des cours d’eau, des zones inondables, des étangs, des marécages, des boisés et des friches.

Pas de BAPE

Rappelons que le projet de Northvolt se déclinera en trois usines distinctes sur le site : une usine de fabrication de matériaux actifs de cathodes, une usine de fabrication des composantes de batterie et une usine de recyclage de batteries. Chacune de ces usines présente un niveau de risque différent.

Ian Courtemanche, directeur général de l’évaluation environnementale et stratégique au ministère de l’Environnement, a rappelé que l’usine de cathodes n’était pas soumise à un examen du BAPE (Bureau d’audiences publiques en environnement), car le seuil applicable de tonnes métriques d’émission est de 60 000, alors que l’usine en émettra 56 000 annuellement. Notons que ces seuils ont été révisés en février dernier, quelques mois avant l’annonce du projet Northvolt, ce qui soulève beaucoup de critiques dans le public.

Concernant ces critiques, M.Courtemanche a expliqué qu’une modification de loi était un long processus, et qu’il avait été entamé bien avant l’arrivée de Northvolt. Il souligne que le gouvernement s’est inspiré de ce qui se faisait ailleurs au pays ou à l’international pour bâtir un règlement qui colle à la réalité de la filière batterie. Cette réponse n’a toutefois pas convaincu la plupart des intervenants qui ont pris la parole pour dénoncer un manque de transparence de la part du gouvernement.

La deuxième usine ressemble plus à une « usine de montage », avec la création de batteries. Cette usine n’est pas assujettie au BAPE, qui nécessite seulement une autorisation ministérielle. La troisième usine sera assujettie à une procédure du BAPE en raison des risques que représentent certains procédés et de l’usage de produits chimiques. C’est aussi à ce moment que plus de détails seront connus sur l’impact de l’usine sur la rivière, un point soulevé par plusieurs personnes pendant la soirée.

Le terrain

Le 8 janvier dernier, une première autorisation a été donnée à l’entreprise par le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs pour les travaux préparatoires, ce qui comprend la coupe d’arbres et le remblai de milieux humides.

À terme, le projet ne doit toutefois pas empiéter significativement sur des secteurs plus sensibles du site, notamment les cours d’eau, l’ensemble des zones inondables et les milieux humides qui servent d’habitat pour le petit blongio, une espèce d’oiseaux menacée. L’oiseau est considéré comme une espèce dite « parapluie », et sa protection permet indirectement d’assurer la protection d’autres espèces qui transitent sur le site. Il s’agit de mesures soulevées dans un avis faunique, qui s’additionnent à une recommandation de la création d’un corridor d’une centaine de mètres comme zone de conservation et de l’ajout de bandes élargies. Les travaux doivent aussi être exécutés en dehors de moments critiques pour la nidification ou les périodes de reproductions de certaines espèces. Le ministère exigera aussi des barrières d’exclusions, dans des zones où se trouvent des tortues. « Dans certains cas, nous exigeons des compensations, qui peuvent prendre par exemple la forme de dortoir », a illustré Jean-François Ouellet, directeur de la gestion de la faune, de l’Estrie, de Montréal, de la Montérégie et de Laval.

Il rappelle qu’une compensation financière de 4,75 millions sera versée au Programme de restauration et de création de milieux humides et hydriques. Questionné par l’assistance, M. Bitzakidis s’est dit conscient de la faible utilisation concrète de ce fonds pour la restauration de milieux humides, mais il a affirmé que son ministère cherchait à le promouvoir. L’entreprise s’est aussi engagée à préserver des milieux humides en dehors du site comme compensation.

L’entreprise devra obtenir une autorisation pour chaque étape de construction et d’exploitation (ce qui inclut les rejets atmosphériques, dans l’eau, le bruit et la gestion des matières dangereuses. Éventuellement, une autorisation sera émise pour des prélèvements d’eau dans la rivière qui doit tenir compte de l’impact de l’utilisation de l’eau sur les populations de chevaliers cuivrés, une espèce de poissons menacée que l’on trouve seulement dans la rivière Richelieu.

La soirée s’est terminée par une période de questions qui a duré près de deux heures.

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