Le pédiatre Jocelyn Lavigne est chef du département de pédiatrie au Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de la Montérégie-Est. L’Association des pédiatres du Québec s’est prononcée la semaine passée en faveur de la réouverture des écoles.
« L’isolement prolongé chez les jeunes, tout comme chez les adultes, peut développer éventuellement des symptômes de maladie mentale au sens large du terme, que ce soit de la tristesse, de l’anxiété ou la perte de repères. Il est vraiment important pour ces enfants d’entrer en relation sociale avec leurs pairs », explique d’emblée le Dr Lavigne.
Ce dernier a donné une entrevue aux médias afin d’aider les parents à prendre une décision sur le retour ou non de leurs enfants à l’école. Parmi les principales raisons, il souligne aussi l’importance d’aider les enfants ayant des difficultés d’apprentissage qui n’ont pas accès, actuellement, aux ressources auxquelles ils ont normalement droit à l’école.
« Il faut que les parents fassent un choix avec lequel ils seront confortables. Ce que je voyais sur le site du [ministère de] l’Éducation me semble rassurant et conforme avec les recommandations de la santé publique », ajoute le Dr Lavigne.
Il a voulu rappeler que les enfants semblent peu affectés par la COVID-19. « Les enfants qui ont montré [des symptômes] sur notre territoire présentaient simplement un gros rhume. S’il n’y avait pas eu le contexte de pandémie, ces parents ne seraient vraisemblablement pas venus consulter. »
Si l’enfant a une maladie chronique ou complexe, le Dr Lavigne recommande aux parents de consulter leur médecin. Selon la documentation scientifique, les enfants présentant des maladies chroniques ou complexes ne sont pas surreprésentés parmi les cas de COVID documentés.
« C’est vraiment rassurant. Il faut être prudent si l’enfant a une maladie cardiaque ou pulmonaire. Encore là, ce n’est pas pareil d’un enfant à l’autre. L’autre élément qui nous est soulevé, c’est l’asthme, mais il y a une différence entre un enfant qui utilise ses pompes quelques fois par année pour une allergie saisonnière et l’enfant qui a besoin de cortisone par la bouche. Vous comprenez qu’il y a un large spectre au sein d’une même maladie. En cas de doute, consultez », affirme-t-il.
Pour les enfants en immunosuppression, il recommande de consulter le guide de l’Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS) qui a défini l’immunosuppression significative. « Si les parents se sentaient en confiance d’envoyer leur enfant à l’école l’hiver passé même en saison d’influenza, vraisemblablement aujourd’hui, il serait encore en mesure de fréquenter une école », croit-il.
La situation est différente si ce sont les membres de la famille qui présentent une maladie chronique ou qui sont immunosupprimés. « Les recommandations de la santé publique s’appliquent. »
La directrice de la santé publique de la Montérégie, Julie Loslier, a aussi expliqué les raisons qui ont poussé à la réouverture des écoles. « La principale raison est de contrer les effets pervers du confinement chez les enfants, effets plus marqués chez certains enfants comme ceux avec des troubles d’apprentissage, ceux qui vivent dans des foyers moins sains ou ceux qui peuvent être exposés à de la négligence ou de la violence. L’école a un rôle non seulement académique, mais aussi social et permet un certain filet de sécurité pour ces enfants », mentionne-t-elle.
Un syndicat inquiet
Le président du Syndicat de Champlain, Éric Gingras, manifestait quelques inquiétudes quelques jours après l’annonce du gouvernement. Quelle sera la consigne dans la cour de récréation? Qu’arrive-t-il si un conjoint d’un enseignant est immunosupprimé?
« Pour l’instant, beaucoup de questions sans réponses. Chaque jour, on essaie d’avoir des informations, mais ce n’est pas facile. On sent que c’est un plan improvisé. On s’attendait à un point de presse qui nous réconforterait, mais ce n’est pas le cas. On pense que ce que [le ministre de l’Éducation] a dit ne passe pas le test du réel », croit-il.
Malgré tout, il assure que les enseignants vont se retrousser les manches. « On va s’assurer de la sécurité du personnel et des enfants. On veut des équipements de protection et on veut des consignes claires. Le milieu de la construction, quand il a été ouvert, a eu un guide de la CNESST le jour même. On attend le nôtre. […] On veut que les jeunes aient du plaisir », ajoute-t-il.
Au moment de mettre sous presse, la CSP n’avait pas répondu à nos questions.
De meilleures conditions
Le Syndicat de Champlain réclame de meilleures conditions de travail pour les employés de soutien qui ont poursuivi leur travail au cours des derniers mois pour assurer le maintien des services de garde d’urgence. Ce sont des éducatrices en services de garde, des techniciennes en éducation spécialisée et des concierges. Sur le territoire de la CSP, on retrouvait une quinzaine de services de garde d’urgence destinés aux enfants d’employés de services essentiels.
« Ce sont souvent des personnes en situation d’emploi précaire. Elles ont moins d’heures et sont moins bien rémunérées. Elles avaient des petites primes incluses dans la convention collective pour compenser les chiffres coupés. En raison du décret gouvernemental, on leur a coupé ces primes », dénonce-t-il.
À la CSP, le système de paie ne permettait pas d’enlever la prime. Maintenant que la problématique a été réglée, les employés verront la prime versée enlevée de leur paie de façon rétroactive.
« On sait que ce n’est pas la faute de l’employeur même si on espère que l’employeur va aller au-devant du gouvernement. […] C’est un manque de reconnaissance. Il y a d’autres anges gardiens qui s’occupent des enfants. On a fait des représentations auprès du gouvernement, mais on a reçu une fin de non-recevoir. On continue à faire des démarches », conclut M. Gingras.