Le conseil de Ville est appelé à accorder un permis de démolition lorsque des citoyens s’opposent à une décision du comité de démolition. Au cours des dernières années, les élus ont d’ailleurs dû trancher à quelques reprises.
«On est tannés de vivre ces situations où c’est le conseil qui doit prendre une décision, raconte la mairesse Diane Lavoie. Évidemment, ce sont des dossiers toujours émotifs parce qu’il y a une histoire autour de ces résidences-là.»
Au cours des cinq dernières années, la municipalité a traité 43 demandes de démolitions. La plus grande partie de ces demandes, soit 40%, sont situées dans le district électoral du Vieux-Belœil.
Seulement sur la rue Richelieu, Beloeil a enregistré une dizaine de demandes de démolition sur des édifices différents depuis 2010. La Société d’histoire Beloeil-Saint-Hilaire (SHBMSH) se dit d’ailleurs particulièrement inquiète de cette tendance.
La mairesse indique cependant que le secteur du Vieux-Belœil pourrait faire partie d’une zone patrimoniale, où la démolition ne serait pas permise.
Règlement peu applicable
Certaines demandes de démolition ciblaient des édifices anciens. Le cas de la maison Flavien-Desranleau, au 730, rue Richelieu, avait poussé la municipalité à se doter d’un outil afin d’empêcher les propriétaires de laisser une maison à l’abandon après un refus de démolition. Selon son règlement, la Ville peut forcer le propriétaire d’une maison délabrée à entreprendre des travaux. Si l’intention du règlement est bonne, il est toutefois difficilement applicable puisqu’il exige une expertise en bâtiment et de longs délais légaux, croit la Société d’histoire Beloeil Mont-Saint-Hilaire.
«Le problème quand on refuse une démolition, on n’a pas vraiment de mordant, reconnait également la mairesse. On ne peut rien exiger et ce sont des processus qui sont longs et le bâtiment continue de se détériorer entre temps.»
Peu de maisons classées patrimoniales
Pour préserver leur patrimoine bâti, les municipalités du Québec ont à leur disposition un pouvoir de citation pour classer un édifice patrimonial s’il a une valeur historique, architecturale, humaine ou scientifique. La Société d’histoire Beloeil-Mont-Saint-Hilaire déplore cependant que la municipalité ne fasse pas usage de ce pouvoir.
À Beloeil, seules deux maisons sont classées patrimoniales, soit la maison Guertin et la maison Jean-Baptiste-Lamothe, toutes deux sur la rue Richelieu. D’autres résidences, pourtant répertoriées dans l’inventaire du patrimoine bâti et qui figurent sur le circuit patrimonial de la Ville, n’ont pas ce statut.
Plusieurs maisons du Vieux-Beloeil pourraient d’ailleurs recevoir ce statut, croit la SHBMSH. Les deux membres citent entre autre les maisons de la rue Saint-Joseph.
«La seule protection qu’on a aujourd’hui contre la démolition du patrimoine, c’est la loi sur la protection sur les biens culturels, déplore pour sa part Pierre Gadbois, membre de la société. Le gouvernement provincial s’est déchargé de cette obligation-là sur les municipalités. Si les municipalités ne veulent absolument pas s’en servir, on est faits.»
La mairesse Diane Lavoie confirme que le conseil municipal ne souhaite pas utiliser son pouvoir de citation. Elle explique que le classement patrimonial d’une maison est restrictif et coûteux pour les propriétaires, qui ne peuvent plus rénover leur maison comme ils le souhaitent.
Le président de la Société d’histoire, Alain Côté, croit pourtant que la Ville pourrait instaurer un programme pour les maisons citées pour aider les propriétaires de maisons anciennes à rénover leur bâtiment, ce qui encouragerait les propriétaires. La Ville possède présentement un programme de rénovation de façades qui s’applique au Cœur de Beloeil. Permettre d’autres usages à des maisons anciennes pourrait également aider aux efforts de conservation croit la société. M. Côté cite notamment le cas de nombreux restaurants dans le Vieux-Beloeil qui ont restauré de vieilles maisons.
Nouvelles disposition du projet de loi
Le projet de loi 122 sur la gouvernance municipale pourrait accorder plus de pouvoir aux municipalités pour gérer les immeubles détériorés. Les municipalités pourraient émettre des avis publics de détérioration au registre foncier qui donnerait 60 jours au propriétaire pour apporter des correctifs. Passé ce délai, la municipalité pourrait entreprendre les travaux ou exproprier les propriétaires.
La mairesse de Beloeil se réjouit de cette possibilité, soulignant que cette règlementation donnerait un réel pouvoir d’action aux municipalités.