20 octobre 2025 - 05:00
Nouveau Belœil
Les promoteurs craignent un gouffre financier de 136 M$
Par : Olivier Dénommée
Les Bourgs de la Capitale.
Photo gracieuseté

Les Bourgs de la Capitale. Photo gracieuseté

Après avoir signé une lettre en juin dernier pour dénoncer la direction que prend la Ville de Belœil dans le dossier du futur quartier surnommé le « Nouveau Belœil », les promoteurs immobiliers Les Industries Bonneville, Groupe Michaudville inc. et Groupe Immobilier Potvin reviennent à la charge avec une publicité affirmant que « Belœil a besoin d’habitations, pas de mirages ». Selon leurs affirmations, la vision actuelle du développement se traduirait par un gouffre de 136 millions de dollars.

Publicité
Activer le son

Dans leur nouvelle sortie, les trois promoteurs bien implantés dans la région assurent que leur intention est de construire « des milieux de vie accessibles et durables, adaptés à la réalité des familles », mais que la Ville de Belœil « bloque » le développement au profit d’une vision « irréalisable ». « Nous ne comprenons pas pourquoi la Phase 5 du projet [des Bourgs de la Capitale, qui correspond en grande partie au territoire visé pour le Nouveau Belœil] a été écartée par la Ville, sans aucune explication, malgré nos nombreuses démarches. Jamais, au cours de nos carrières professionnelles, nous n’avons été témoins d’un aussi grand manque de transparence de la part des élus d’une Ville », dénoncent-ils.

Après avoir fait appel ces derniers mois à trois firmes (APUR, Ingénir et Prud’Homme, Mercier et Associés) pour analyser le projet de la Ville, les promoteurs en viennent à la conclusion qu’il entraînerait « un gouffre financier évalué à plus de 136 millions de dollars ». « Il ne s’agit pas d’une perte de profit, mais d’une impasse économique puisque ces coûts ne peuvent être absorbés ni par nous [les promoteurs], ni par les acheteurs, ni par les locataires. » Notons qu’il n’a pas été possible pour le journaliste de consulter les analyses des spécialistes et que les signataires n’ont pas accordé d’entrevue sur leur sortie contre le projet de la Ville, mais Manon Potvin du Groupe Immobilier Potvin a précisé par courriel que les trois firmes externes ont « travaillé en étroite collaboration » pour produire leur rapport d’évaluation du projet, menant à la conclusion que le « volet constructeur » du projet mènerait à des pertes de 57 200 000 $, alors qu’un montant de 79 000 000 $ en pertes est associé aux terrains, aux rues et au pieutage supplémentaires, donnant un total de plus de 136 M$. « À noter que plusieurs dépenses n’ont pas été évaluées, entre autres, les surtaxes de terrains vacants, l’impact des logements abordables… », commente Mme Potvin.

La question du logement abordable est également menacée, toujours selon les promoteurs qui seraient « en voie de perdre, au profit d’une autre ville, un projet subventionné, permettant l’achat de propriétés abordables ». Mme Potvin mentionne dans son courriel que des discussions ont lieu depuis quelques mois avec un OBNL à la recherche d’un terrain pouvant accueillir un projet de type coopérative qui permettrait l’accès à la propriété à des familles à revenus moyens, mais que si Belœil ne change pas sa vision, le projet serait compromis et l’organisme aurait déjà poursuivi ses recherches dans d’autres municipalités.

« Le verdict est sans équivoque : le projet tel que conçu par la Ville est non viable, irréaliste et déconnecté des besoins réels de la population », insistent les trois promoteurs, lançant en même temps une série de questions sur la transparence de la Ville dans ce dossier du Nouveau Belœil. Ils concluent leur sortie avec un « appel au réalisme et à l’action », une invitation à la prochaine administration de changer de cap dans ce dossier.

Réponse de la Ville

Invitée à commenter certaines affirmations des promoteurs, la porte-parole de la Ville de Belœil, Émélie Trinque, rappelle que la Ville a invité en 2023 les promoteurs à soumettre leur propre vision de développement pour le secteur. « Or, la proposition déposée n’a pas répondu aux attentes du conseil municipal. » Elle assure que la Ville a « toujours agi de bonne foi et demeure ouverte au dialogue afin d’en arriver à un projet cohérent avec la vision collective de développement du secteur ». Elle note que la dernière rencontre de travail avec les promoteurs date de juillet dernier, au cours de laquelle il a été convenu de reporter à l’automne l’adoption du plan particulier d’urbanisme (PPU) du Nouveau Belœil. La Ville aurait depuis invité les promoteurs à formuler des commentaires sur la dernière mouture du projet de PPU, mais ces derniers auraient choisi de ne pas participer à cette étape de consultation.

Pour ce qui est du gouffre financier annoncé par les promoteurs, Mme Trinque soutient que l’objectif du PPU est « d’établir un cadre d’aménagement et des principes directeurs qui orienteront le développement du secteur », ce qui va guider la conception des projets à venir dans le secteur, « qui devront être conformes à ces orientations tout en demeurant rentables pour les promoteurs ». La Ville doit aussi réaliser dans les prochains mois une étude d’impact fiscal sur les services municipaux afin d’évaluer les revenus anticipés et les coûts associés à ce futur développement.

Il est prévu que le PPU du projet soit adopté cet hiver, suivi de l’adoption des amendements nécessaires aux règlements d’urbanisme. La première phase du prolongement de la rue Serge-Pepin pourrait débuter dès 2026. Quant à la future école, sa construction pourrait débuter en 2027 pour une ouverture à la rentrée 2029. « À la suite de l’adoption du PPU, plusieurs études complémentaires seront réalisées, notamment en matière de circulation, de plan directeur des infrastructures et d’impact fiscal, afin d’assurer une planification cohérente et durable du quartier », conclut Mme Trinque.

image