Notre député, Simon Jolin-Barrette, est le champion des donateurs, avec un montant de 81 000 $ en trois ans. Et M. Jolin-Barrette aurait dû s’expliquer à la journaliste du Devoir pour dissiper les doutes. Une maladresse qui a laissé planer un malaise un certain temps avant qu’il réponde dans nos pages.
L’article est spontanément apparu comme une surprise à mes yeux. Parce que je côtoie sur une base assez régulière le Grand Chevalier Claude Lebrun. Ancien pompier, ancien conseiller municipal, ancien candidat aux élections de Belœil et, surtout, bénévole dévoué pour sa région. Je le vois se démener quotidiennement pour offrir du réconfort et des services aux plus démunis : leur offrir le comptoir alimentaire, des manteaux d’hiver, une clinique d’impôts, la Guignolée, etc. Lui et sa bande de bénévoles ont le cœur sur la main. Naturellement, donc, quand le bureau de Simon Jolin- Barrette annonce donner un montant, ce n’est jamais l’organisme directement qu’il finance, mais une des initiatives que je viens de mentionner. Moi-même, pourtant ouvertement anti-religion et me voulant un allié des luttes féministes, je n’ai jamais vu le scandale. Peut-être qu’il y en avait un, mais j’avais en face de moi des gens tellement dévoués que je ne voyais pas le mal.
Mais avec le recul, l’article du Devoir n’avait rien de surprenant. L’organisation des Chevaliers de Colomb a quelque chose d’anachronique, c’est le moins qu’on puisse dire. La position contre l’avortement, c’est une chose. Mais qu’en 2022, une femme ne puisse pas joindre l’organisation montre que les Chevaliers n’ont pas suivi la parade. Et M. Lebrun le sait. Nous en avons souvent discuté. D’ailleurs, son malaise est affiché concernant la place des femmes et je sais qu’il fait des efforts pour changer la situation au niveau du chapitre local de Belœil. Mais son organisme s’inscrit quand même dans une tradition plus large et mondiale, et les traditions tendent à évoluer lentement, particulièrement lorsqu’on parle de la religion catholique.
Mais je ne pense pas que le chapitre de Belœil fasse dans le prosélytisme religieux. Ses racines catholiques sont manifestes, certes, et le jupon dépasse un peu. Mais je refuse de m’y arrêter.
M. Lebrun travaille d’ailleurs à mettre sur pied une fondation laïque pour continuer de recevoir des fonds d’organismes comme les municipalités qui pourraient avoir un malaise avec certaines positions des Chevaliers. Non pas pour financer son organisme, mais bien pour continuer d’offrir ses services.
D’où mon conflit interne. L’idéologue en moi est plus que mal à l’aise avec les positions des Chevaliers de Colomb; tout comme je suis mal à l’aise de l’aide internationale lorsqu’elle est entre les mains de missionnaires religieux.
Mais le pragmatique en moi sait que l’aide-bénévole n’est pas en croissance et que les organismes comme les Chevaliers de Colomb peinent à recruter des membres. Leur retirer des fonds pourrait mettre en péril la sécurité alimentaire et physique de plusieurs de mes concitoyens les moins fortunés. Alors, pour un temps, si ces visions archaïques ne transparaissent pas dans l’offre de service, ce compromis me convient.