C’est en aménageant avec deux amis du cégep que son projet a vu le jour. « Les deux collaboraient à Ton canapé, un blogue de critiques sur le cinéma qui a fonctionné une dizaine d’années. Ils consommaient des films et des séries chaque jour pour écrire et j’ai moi-même eu envie d’écrire. Inconsciemment, leur blogue a influencé le titre du mien », souligne Olivier Dénommée.
Rapidement, Olivier se met à rédiger des critiques et à développer son processus. « J’écoute un album ou un EP pendant une journée complète. Il joue aussi en background, même quand je dors. Ça m’habite pendant 24 h, puis je laisse évacuer ce que j’en retiens. Je ne laisse pas trop mijoter, car ensuite, je passe au prochain. » Son approche se veut surtout constructive et dans la découverte. Et ouverte à tous! « Perso, même si j’ai une formation de base en musique, je ne veux pas juste plugger des termes techniques ou aller dans le trop cérébral. Je veux être un bon compromis pour rejoindre le plus de monde et être constructif, même si certaines critiques peuvent être raides. J’accepte aussi que mes collaborateurs soient plus rough, mais je leur demande d’assumer ce qu’ils écrivent. »
Plusieurs critiques Web peuvent avoir un petit côté « prétentieux » dans leur travail, une approche que veut éviter l’auteur de Critique de salon. « Je n’aime pas me faire dire que je suis cave si j’aime quelque chose. Ou si c’est trop niché ou dur d’écoute, de me faire dire que je n’ai pas saisi. Je cherche donc un équilibre entre bon pour tous ou bon pour celui qui cherche quelque chose de plus corsé. »
On trouve un peu de tout sur Critique de salon, mais l’auteur du site Web admet avoir ses genres de prédilection. « Comme mélomane, j’ai un faible pour le violon et les cordes. Le mouvement néo-classique en général aussi, même si certains [artistes] s’en dissocient. Mais pour le public en général, c’est un terme qui parle. » Il a aussi un intérêt marqué pour la musique de jeux vidéo, l’indie rock et l’indie pop. « J’aime beaucoup les artistes qui sont moins connus; certains m’écrivent et me donnent même leur premier EP pour avoir mon avis. »
Olivier se considère tout de même comme un critique généraliste, capable de se prononcer si le style n’est pas dans un créneau niché. « Le free jazz, même si j’ai une formation jazz, je ne toucherai pas à ça. Le métal extrême ou le classique contemporain avec une note toutes les 30 secondes, je vais laisser ça à des critiques spécialisées. J’ai fait un peu de hip-hop, mais je n’analyse pas tant les paroles, alors pour un genre où les paroles sont importantes, je me sens moins habilité. »
Sans surprise, le journaliste culturel parle énormément aux artistes de la Vallée-du-Richelieu en raison de ses fonctions à L’ŒIL; l’écoute de la musique locale se taille donc naturellement une place sur son blogue. Le journal et son site deviennent donc deux vases communicants. « Je peux aller plus loin sur le site. Je peux être le même journaliste, mais avec deux chapeaux différents. »
Ressourcement
En 2020, Olivier a pris une pause dans son projet. « C’était rendu épuisant avec la pandémie, j’étais toujours sur mon ordi à la maison. Donc, j’ai arrêté pendant trois ans pour juste écouter la musique, sans baser mes choix sur ce que je devais écouter pour en faire une critique. Ça avait contaminé ma façon de voir la musique. Je n’avais plus envie de dire ce que je pensais des albums que j’écoutais pendant un temps. »
La pause lui a fait du bien. « Ça m’a permis de me dire ce que j’aimais et n’aimais pas de mon projet. À la fin, je courais pour être le plus à l’affût possible et couvrir les nouveautés, sans me demander ce que j’avais le goût d’écouter. » Après trois ans de pause, le 1er octobre 2023, Olivier a repris la plume avec une nouvelle approche. « J’ai appris à mieux gérer mon temps. J’ai des souvenirs de m’être privé de sortir, car je m’imposais l’écriture d’une critique. Je m’empêchais de vivre pour écrire et je basais mon horaire sur ça. Là, je veux garder un bon rythme pour écrire chaque semaine, mais pas m’empêcher de vivre. J’écris sur ce que j’aime, sur les albums que j’ai envie d’écouter et les spectacles que je couvre. »
Pour découvrir les critiques d’Olivier : critiquedesalon.ca.
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Question en rafales
Son album préféré dans les critiques : « Je pense que c’est encore l’album éponyme d’Apocalyptica (2005). J’étais ado et c’est un album qui m’a suivi. Il fait partie des influences qui m’ont dirigé vers la musique. Le métal instrumental, avec des cordes, ça coche toutes mes cases. »
Le meilleur album à écouter en voiture : « Je vais me compromettre, mais du Taylor Swift, ça s’écoute bien. Ça m’a pris des années à l’accepter. Avec 1989, elle a vraiment pris un virage pop. Et même si j’ai résisté, un bon album, c’est un bon album. »
Dans ses pires albums : Avec une note de 3,6 sur 10, The Octaves and the Eagles remporte la palme avec son EP Within the Mothership. « C’est mémorable. L’enregistrement n’était pas professionnel, le son n’était pas bon, les musiciens n’étaient pas tight. Ils voulaient se donner un son à la Pink Floyd ou The Doors, mais l’exécution n’était pas réussie. J’avais été dur, mais un membre m’a écrit plus tard pour me remercier de cette critique. Ils avaient su sur quoi travailler et avaient par la suite enregistré un nouvel album, vraiment meilleur. »
Sorties coup de cœur : « J’ai eu beaucoup de plaisir à écrire sur le EP Acte III, Scène II, de Simon Leoza. C’est vraiment bon, même si c’est juste trois pièces. C’est un artiste que je suis de près depuis des années [notamment sous son ancien pseudonyme Tambour]. Aussi le EP Avant qu’on se déteste, de Noé Talbot, paru sous le label Slam Disques. C’est un projet folk acoustique, avec des textes recherchés. Une belle découverte de la dernière année. »
Quelques coups de cœur récents
– Je suis tombé récemment sur A Kind of Dreaming, le premier album du duo irlandais Driven Snow, paru cet hiver. Sans réinventer la roue, c’est un indie folk très réussi avec de belles lignes vocales de la part des deux musiciens. La chanson « Flickers of You » est particulièrement envoûtante.
– C’est une bonne année pour la pop, avec des sorties de Taylor Swift, Beyoncé, Dua Lipa, Billie Eilish ou encore Sabrina Carpenter, mais j’ai un faible pour le deuxième album de l’Australienne Tones and I, Beautifully Ordinary. Et avec une durée de 63 minutes et 16 chansons, difficile de ne pas y trouver son compte!
– J’ai un gros coup de cœur pour la musique de l’Américaine Audrey Pearl, particulièrement son deuxième EP, Long Term Plans : un folk un peu déprimant à la Phoebe Bridgers, mais tellement efficace, spécialement sur « Never Go Back ». Elle n’a pas encore fait ses preuves sur album, mais c’est un nom que je vais suivre avec beaucoup d’attention.
– Le nom d’Elliot Maginot mérite décidément d’être de plus en plus connu, lui qui multiplie les bons coups avec sa musique indie folk empreinte de vulnérabilité. C’est aussi vrai pour son dernier album, I Need to Stay Here, paru au printemps dernier. Et, bonus, il est aussi excellent en spectacle!
– Au risque de paraître chauvin, le dernier album de Roman Zavada, Forêt pour deux pianos, vaut franchement le détour. C’est vraiment le genre de musique à écouter quand on veut se laisser porter par les ambiances et les émotions, et ce, sans la moindre parole. Pas pire pantoute pour un gars qui vient de Belœil!