Si, à une certaine époque, la contribution de M. Michel a joué un rôle crucial dans la mise en lumière de la culture autochtone dans l’espace public, les temps ont changé. En écho à la lettre d’André Michel intitulée « Faux, pas de chicane sous le Tee-Pee! » [L’Œil Régional, 21 janvier], il est crucial de rappeler que la reconnaissance des efforts passés ne change rien au fait que les Premières Nations sont les mieux placées pour gérer les institutions qui les concernent. Le rôle des alliés demeure crucial, mais il doit évoluer vers un soutien respectueux, laissant la gouvernance aux premiers concernés.
La question de l’appropriation culturelle ne se résume pas uniquement à l’exploitation de nos traditions et symboles par des personnes allochtones. Elle se manifeste aussi par le contrôle exercé sur des institutions censées appartenir aux Premières Nations. N’en déplaise à M. Michel, il s’agit là d’une pratique coloniale perpétuant une dynamique de domination et de dépo- ssession, qui va à l’encontre des principes d’autodétermination et de reconnaissance des peuples autochtones.
Reconnaître la contribution de M. Michel et de sa conjointe, Chantal Millette, ne veut pas dire que l’appropriation culturelle doit passer sous silence. La Maison, plutôt que de mettre pleinement en valeur les créations et les perspectives des artistes autochtones, sert davantage à exposer les œuvres de non-autochtones, notamment celles d’André Michel et de Riopelle, qui peignent fré- quemment des sujets autochtones. Comme d’autres avant eux, ils doivent s’adapter au paysage changeant de notre ère s’ils souhaitent continuer à soutenir la cause autochtone de manière respectueuse et pertinente.
S’approprier la culture et s’imposer dans la gestion des affaires autochtones appartient à une époque révolue. L’heure est à la promotion d’initiatives portées par et pour les Autochtones, notamment au sein d’institutions comme La Maison autochtone, destinée à célébrer nos cultures. Le rôle des alliés ne devrait pas être de diriger, mais d’appuyer les Premières Nations dans leur quête d’autonomie et de reconnaissance.
Valoriser des approches qui placent les Premières Nations aux commandes de leurs propres initiatives est un pas de plus vers une véritable réconciliation et une reconnaissance légitime de nos droits et savoirs ancestraux. Alors qu’un grand nombre d’artistes autochtones multidisciplinaires émergent, La Maison autochtone devrait s’engager à prioriser leurs œuvres, en leur offrant une visibilité et une place centrale. C’est ainsi que nous assurerons un avenir où l’échange culturel ne sera plus marqué par des dynamiques inéquitables, mais par un respect mutuel et une collaboration sincère.
Jacques T. Watso
Conseiller élu au Conseil des Abénakis d’Odanak