17 février 2025 - 05:00
En réponse à la lettre « Maison autochtone : un espace à laisser aux premiers concernés »,parue dans notre édition du 10 février
Ne pas confondre appropriation et appréciation culturelle
Par: L'Oeil Régional

Tout d’abord, mon cher Jacques Thériault-Watso, je tiens à te remercier pour tes bons mots à mon égard au sujet de mon implication à protéger et faire rayonner la culture des Premières Nations avec mes œuvres et les musées autochtones que j’ai fondés. Je connais ton engagement à dénoncer tout ce qui touche l’appropriation culturelle, mais dans le cas qui concerne mon ami Riopelle et moi, au sujet de La Maison autochtone, ton discours sonne faux puisque tu sembles trop influencé par l’ancien président de l’institution, qui est venu se pavaner à mes côtés durant de nombreuses années en Europe à l’ouverture officielle des expositions de mes œuvres.

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Pourquoi tu ne dénonces pas aussi les « personnes opportunistes », ces individus qui n’ont jamais vécu en forêt ni sur une réserve, mais qui ont travaillé très fort pour trouver dans leur lignée quelques gouttes de sang pour avoir le fameux STATUT INDIEN afin de profiter du système canadien pour pouvoir s’acheter un casier postal dans une communauté pour ne pas payer de taxes. Mes amis autochtones les surnomment les « pommes » : rouges à l’extérieur mais blancs à l’intérieur. Ces personnes, que tu devrais dénoncer haut et fort, font une vraie appropriation au détriment des natifs autochtones. Ils vont jusqu’à se déguiser lors des pow-wow! Aucune spiritualité, aucun respect des traditions, mon cher Jacques.

Tu confonds dans notre cas appropriation et appréciation. Dans l’appropriation, il n’y a que la personne qui s’approprie et qui usurpe la culture des Autochtones à leur détriment. Dans l’appréciation, il y a un échange, une reconnaissance et une permission. L’appréciation consiste à chercher à comprendre et à apprendre une autre culture dans le but d’élargir sa perspective et de nouer des liens avec l’autre culture. Tu devrais savoir qu’une façon simple de se rappeler la différence entre l’appropriation culturelle et l’appréciation culturelle est que la première consiste à déshonorer ou à rabaisser une culture tandis que la deuxième travaille à honorer et à valoriser une culture. Et c’est ce que je fais depuis plus de 50 ans. Je suis un peintre ethnographe. Les Autochtones des trois Amériques et plus particulièrement les Innus ont toujours posé volontairement et sans obligation devant moi. Et ils en étaient fiers, car ils voyaient à travers ma peinture que j’appréciais leur culture. Mes œuvres ont eu pour seul but de fixer des scènes de vie traditionnelles, souvent disparues, croquées en forêt. Comme le font d’autres musées d’ici et d’ailleurs à travers le monde, La Maison autochtone se fait un devoir, à l’occasion, de rappeler un mode de vie passé aux visiteurs.

Mon ami Riopelle qui était un plasticien m’a aidé à construire en l’an 2000 une bâtisse de deux millions de dollars avec l’aide de nos amis et relations communes, sans aucune subvention gouvernementale de programmes normés, offerte gratuitement à la Ville en 2013. Il est normal que l’institution lui consacre en permanence une salle en guise de reconnaissance. Pour ton information, en 25 ans, La Maison pourtant administré depuis toujours par des Autochtones n’a jamais fait, question d’éthique, une seule demande de subvention au ministère des Affaires indiennes, ni au Secrétariat des Affaires autochtones. C’est pourtant l’un des musées les plus fréquentés des 40 musées de la Montérégie, avec une moyenne de 30 000 visiteurs.

Malgré le faux débat que tu soulèves en faisant passer le fondateur de La Maison autochtone et son ami Riopelle pour des « appropriateurs » culturels, saches que cette institution muséale – qui n’est pas rancunière envers toi –, va continuer de vendre tes produits dont ton excellente sagamité, tant que tu lui en fourniras!

André Michel
Fondateur de La Maison autochtone

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