Rappelons que depuis l’adoption de la loi 96, le statut d’une ville bilingue peut être révoqué si l’anglais est la langue maternelle de moins de 50 % de la population. Selon Statistique Canada, la proportion de la population unilingue anglaise est d’environ 7,2 % à Otterburn Park.
Le lundi 16 janvier, les élus d’Otterburn Park ont officiellement signifié leur intention de renouveler ce statut par une résolution après avoir reçu une demande de l’Office de la langue française, en décembre dernier. Selon la mairesse Mélanie Villeneuve, il n’y a que des avantages à renouveler le statut bilingue. Cette décision respecte selon elle le patrimoine historique de la ville et permet une meilleure inclusion de la population anglophone, souvent plus âgée et vulnérable. Elle souligne également que cela ne retire aucun droit aux francophones et que cela permet seulement de communiquer en anglais si nécessaire. Concrètement, lors de la parution du bulletin municipal L’Info Otterburn, la Ville produit du même coup quelques copies traduites en anglais, en noir et blanc, qui sont distribuées à des endroits stratégiques. La Ville dépense un peu moins de 5000 $ annuellement en frais de traduction.
Pas de consultation
Pour l’ancien maire Gérard Boutin, qui s’est présenté au micro de la dernière séance publique du conseil municipal de lundi, la Ville aurait dû consulter sa population. Il rappelle que la Ville avait 120 jours pour répondre à la lettre de l’Office et qu’en plus, les élus étaient au courant des modifications apportées par la loi 96 et qu’ils avaient amplement de temps pour consulter la population. Si la mairesse Villeneuve s’est défendue en disant que la Ville avait fait un travail de communication pour informer ses citoyens, M. Boutin dit avoir appris la nouvelle seulement la semaine dernière, via L’ŒIL. Mme Villeneuve a aussi ajouté que la position du conseil était claire depuis au moins août dernier et que, depuis, elle n’a reçu que deux courriels défavorables. Elle souligne aussi que lors de la campagne électorale, elle a été claire sur ses intentions de rester en communication avec la communauté anglophone et que toute sa documentation électorale était bilingue à cet effet. Elle affirme effectivement que son conseil n’a jamais eu l’intention de mettre sur pied un processus de consultation. « On ne retire rien, on ne coule rien dans le béton. On ne fait que maintenir le statu quo jusqu’au prochain recensement. Et nous avons eu beaucoup de commentaires positifs sur ce choix. »
M. Boutin ajoute que les médias sociaux « se sont enflammés » dans les derniers jours et que les élus, par ce fait même, avaient « sous-estimé la sensibilité entourant cette question ». Il a ajouté que la communication n’avait pas été « très efficace » dans ce dossier.
Reste du Québec
« Le Québec est en démarche pour améliorer [la condition] du français et ce qu’on fait ici, à l’encontre de ces grandes orientations, ça dénote que nous ne sommes pas très solidaires du reste du Québec », a ajouté M. Boutin lors de la période de questions, lundi.
Une affirmation que soutient aussi Monik Peclet, une résidente qui se fait encore plus critique de la décision des élus. Elle et un certain nombre de citoyens s’opposent tout simplement au statut bilingue. « Nous avons seulement 70 personnes unilingues anglophones à Otterburn Park. Comment peut-on demander un statut social pour seulement 70 personnes. »
Même si elle concède que ces personnes peuvent être des aînés parfois vulnérables, elle se demande comment ils ont pu vivre 30, 40 ou 60 ans à Otterburn Park sans apprendre le français. « Pourquoi devrais-je me plier et avoir des frais de traduction pour 70 personnes qui n’ont pas voulu apprendre le français? Je ne peux pas être d’accord avec ça. »
Selon elle, même si la Ville a le droit de voter une résolution en ce sens, garder un statut bilingue ici va à l’encontre de l’esprit de la loi 96 et cette décision n’est pas solidaire avec le reste du Québec. Elle pense que la Ville devrait soutenir la sauvegarde du français, notamment à Montréal. « On se bat pour des questions de principe et de valeurs. »
Pour ce qui est de la place du français au Québec, la mairesse Villeneuve soulignait en entrevue que sa réflexion restait locale. « Je prends en considération notre communauté, notre population. Je ne fais pas de politique provinciale. »