25 août 2025 - 05:00
Parler de racisme
Par : Vincent Guilbault
Vincent Guilbault

Vincent Guilbault

C’est toujours délicat de discuter de racisme pour une personne comme moi, tout à fait blanc, élevé dans une ville « blanche ».

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Pour vous dire, je pense que j’ai rencontré ma première personne noire au cégep! En fait, le seul noir du cégep. Gab! On l’aimait tous. Grand, fort, drôle. Lors d’un cours de politique – je ne me souviens plus du sujet – il s’était levé pendant que le prof parlait d’une injustice historique vis-à-vis des personnes noires. Il avait haussé un peu le ton, juste assez pour causer un malaise, et il avait demandé au prof s’il était raciste! Le prof était devenu livide; le reste de la classe aussi. Puis Gab s’était mis à rire. « Ben non, c’est une blague, tu sais que je t’aime ». Tout le monde a ri.

Voilà, le racisme n’existait donc pas dans mon petit patelin… Ça résume mon expérience de vie très naïve avec le racisme.

En fait, je pense que ça résume pas mal les questions de racisme pour une bonne partie du monde de ma génération et celles avant moi. « Je ne suis pas raciste, je connais un noir ». Fin de la réflexion. C’est probablement ce qui explique en partie – je dis bien en partie – ce que rapporte l’entraîneur Will Louis dans notre entrevue et dans sa plainte déposée à la Commission des droits de la personne et de la jeunesse. Je vous invite à lire le texte ici avant de continuer.

Il rapporte avoir été victime d’un parent et coach à l’attitude raciste. Comme il dit, ce n’est pas que les attaques étaient ouvertement racistes, mais les méchancetés étaient très personnelles et le visaient directement. Est-ce que c’était du racisme? Ou un ressenti de racisme? Je ne suis pas ici pour valider ou non le sentiment de Will Louis. Mais quand tu es le seul coach noir d’une organisation et que certaines attaques ou critiques ne visent que toi, ça te trotte dans la tête, c’est clair.

Mais bon, un parent bigot, voire raciste, c’est inévitable encore aujourd’hui. La seule chose à faire reste à condamner. Ça, et aussi soutenir la personne qui se dit victime de racisme (ou de harcèlement, de misogynie, d’homophobie, de xénophobie, etc.). Et c’est peut-être ça, le gros drame. Clairement, il semble qu’une organisation comme les Pirates du Richelieu n’a pas réussi à soutenir son entraîneur. Par racisme interne ou systémique dans l’organisation? Probablement pas, en convient Will Louis. J’aime croire que des parents qui s’investissent dans une organisation comme les Pirates le font pour l’amour du sport, du football et surtout, des enfants. En fait, je n’en doute même pas une seconde.

Mais aujourd’hui, il est nécessaire pour chaque organisation, même un OBNL sportif, de jeter les bases d’un code d’éthique, de règlements internes et d’une forme d’encadrement claire. Après avoir conduit trois entrevues avec des parents proches de l’organisation, je sens que, comme bien d’autres OBNL, les Pirates sont victimes de cliques internes, de parents qui parlent plus fort que d’autres, de prises de décisions arbitraires basées non pas sur un code bien réglé, mais sur l’émotion du moment ou le gros bon sens. C’est probablement ce qui fait que, lorsqu’on se retrouve avec une situation où un coach se dit victime de racisme, on a tendance à régler le problème un peu tout croche.

Surtout si on se retrouve avec des parents tous blancs, dont l’expérience vis-à-vis du racisme ressemble à peu près à ce que j’ai vécu, c’est-à-dire pas grand-chose de constructif… Espérons que les membres des Pirates pourront en tirer une certaine forme de sagesse et améliorer leur gestion interne pour le bénéfice du sport et des jeunes.

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