D’abord, il faut comprendre que, même si la Ville est propriétaire du bâtiment, la gestion de l’institution muséale revient à un conseil d’administration indépendant composé d’individus issus des Premières Nations. Certaines informations ne sont donc pas publiques.
Et depuis quelques années, la Ville et l’organisme ne s’entendent pas sur certains points, notamment l’agrandissement de La Maison autochtone.
En 2023, les deux parties n’avaient pas réussi à s’entendre sur les bases d’une nouvelle entente et d’un nouveau bail. La Municipalité avait alors reconduit tacitement le bail, sans qu’aucun accord concret ne soit trouvé. L’été dernier, le musée a perdu son agrément du ministère de la Culture et des Communications, probablement en partie en raison de l’absence d’un bail signé.
Pourtant, à la fin décembre, tout semblait sur la bonne voie : un accord pour la signature d’un nouveau bail paraissait imminent.
Mais cette semaine, notre collègue Denis Bélanger révèle que le conflit n’oppose plus la Ville et l’organisme, mais bien les membres du musée entre eux. Trois présidents du CA se sont succédé rapidement. De plus, ce même conseil d’administration a envoyé une mise en demeure au fondateur du musée, André Michel, ainsi qu’à son épouse, Chantal Millette, qui est aussi la directrice générale du musée. Le CA accuse André Michel et la direction de propager de fausses rumeurs sur une fermeture du musée, tandis que ces derniers reprochent au CA de ne pas avoir la légitimité pour prendre certaines décisions, si je résume grossièrement.
Devant cette impasse, la Ville a choisi d’attendre que la situation interne se stabilise avant de poursuivre les négociations pour un bail.
C’est ici que je mets mes gants blancs. Nul ne peut nier que le musée doit son existence à André Michel, un artiste accompli et un ardent défenseur des arts ainsi que des relations avec les Premières Nations. S’il n’a jamais prétendu avoir des origines autochtones, il a côtoyé ces communautés de près et s’est investi avec passion dans la défense et la mise en valeur de leur culture.
Mais aujourd’hui, il semble que sa présence soit plus source de tensions que de stabilité, tant auprès de la Ville qu’au sein même de l’organisme.
Je comprends que la Maison reste son bébé, mais il arrive un moment où un père doit laisser son enfant voler de ses propres ailes. Même s’il ne siège pas au CA, André Michel reste le fondateur du musée, voisin du site, exposant occasionnel entre ses murs et époux de la directrice générale. Sans compter les innombrables heures de bénévolat qu’il y a consacrées. Impossible donc de dissocier son nom de celui de la Maison, même si, officiellement, il n’a pas de rôle décisionnel.
Et pourtant, il n’hésite pas à prendre publiquement la parole sur le sujet, souvent sur un ton vindicatif.
Lors de nos discussions, André Michel laisse entendre que la Maison ne se porterait pas aussi bien sans lui. Probablement. Mais chaque fois que j’entends ce type de propos, je repense à une citation de Georges Clemenceau, ancien homme d’État français : « Les cimetières sont pleins de gens irremplaçables, qui ont tous été remplacés. » J’ai l’impression en écoutant les rumeurs ambiantes que bien des intervenants au dossier pensent aussi comme ça.