Ramenons la discussion ici. Pour ce faire, je vais écarter l’aspect environnemental. Pas parce qu’il est secondaire – au contraire, il est central –, mais parce que je veux parler surtout de cette claque au visage, ce potentiel perdu.
C’est l’arrêt net d’un momentum. Bien sûr, on nous promettait une foule d’impacts positifs avec l’implantation de l’usine. L’expérience de Skellefteå, en Suède, où Northvolt s’est installée en 2017, laissait entrevoir une explosion démographique. Cette croissance avait stimulé divers secteurs économiques, de la restauration au commerce de détail. Ici, on parlait de plusieurs centaines d’emplois directs et de nouvelles opportunités d’affaires pour les fournisseurs locaux.
Northvolt devait jouer le rôle d’un moteur pour l’économie régionale et favoriser une participation active de notre région à un effort collectif de transition énergétique. Cette usine devait nous offrir un rayonnement international.
C’était un catalyseur. Oui, produire des batteries d’abord, mais stimuler l’écosystème économique. Je l’ai senti dans les discussions avec les élus. Oui, ceux de McMasterville et de Saint-Basile-le-Grand, mais aussi ailleurs. « Il y aura un avant et un après, c’est clair », nous disait avec raison la mairesse de Belœil, Nadine Viau. Avec l’arrivée de l’usine, le marché immobilier bougeait déjà. « Avec notre nouveau quartier [au nord des Bourgs de la capitale], on nous disait que ce qu’on voulait faire ne correspondait pas aux besoins du marché, mais tout d’un coup, avant même d’être construit, on sait que ce sera presque vendu d’avance. » Elle anticipait aussi un effet d’entraînement sur les transports en commun, la route 116, le Mail Montenach.
Même des projets oubliés, comme une traverse piétonnière sur le pont du CN entre Otterburn Park et McMasterville, avaient repris vie. Les élus et des représentants de la Chambre de commerce s’étaient rendus en Suède pour se préparer à accueillir ce mastodonte. Les rencontres avec les acteurs économiques s’accéléraient.
Tout ça… pour ça.
Je pense ce matin aux acteurs politiques, certes, mais aussi à tous ces employés municipaux qui, depuis plusieurs mois, travaillent à la venue de ce géant, les nombreux fonctionnaires ou encore les entrepreneurs qui se préparaient à faire affaire avec Northvolt. Tout ça peut-être pour rien.
Bien sûr, comme le souligne le maire de Saint-Basile-le-Grand, Yves Lessard, on doit continuer à travailler sur l’accès au terrain. Si ce n’est pas Northvolt, ce sera un autre joueur. C’est ce que veut le gouvernement du Québec depuis des années.
Mais si le projet s’effondre, ce ne sera pas qu’une perte industrielle. Ce sera un coup dur pour notre élan collectif.
Comme une défaite partagée. Une occasion ratée.