7 mai 2024 - 05:00
Francisation
Un parcours crucial pour s’intégrer
Par: Olivier Dénommée
Pour Rosina Popazova et Carla Alessandra Rossignoli Agostini, les cours de francisation ne servent pas qu’à apprendre le français, ils permettent aussi de comprendre la société québécoise et ses particularités pour mieux l’intégrer.
Photo François Larivière | L’Œil Régional ©

Pour Rosina Popazova et Carla Alessandra Rossignoli Agostini, les cours de francisation ne servent pas qu’à apprendre le français, ils permettent aussi de comprendre la société québécoise et ses particularités pour mieux l’intégrer. Photo François Larivière | L’Œil Régional ©

Les cours de francisation ne servent pas qu’à apprendre le français : c’est un outil important pour permettre aux immigrants de tisser un réseau dans une région et pour se familiariser avec la réalité du Québec. Il a été possible d’en discuter avec l’enseignante Rosina Popazova et son élève Carla Alessandra Rossignoli Agostini dans la classe où elles se voient sur une base quotidienne de 8 h 30 à 12 h 15 avec une vingtaine d’autres immigrants qui partagent le même but.

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Rosina Popazova note que le nombre de classes de francisation est en hausse dans la région, en comptant plus d’une vingtaine au sein du Centre de services scolaire des Patriotes (CSSP). « Moi, ça fait 14 ans que je suis ici et je suis moi-même passée par toutes les étapes qu’ils vivent. En arrivant dans un nouveau pays, on repart à zéro. C’est donc important de tisser des liens. Ici, on fait des blagues toute la journée et on devient tous amis », soutient l’enseignante originaire de Moldavie.

Les cours sont festifs et, lorsqu’il y a un anniversaire, il y a toujours du gâteau, des chants – les élèves de la classe connaissent d’ailleurs par cœur « Gens du pays » de Gilles Vigneault – et de la danse des différents pays représentés, ce qui aide au sentiment d’appartenance de tout le monde, peu importe ses origines. Sa classe est notamment composée d’immigrants de Colombie, de Turquie, du Madagascar, du Vietnam, d’Haïti, du Mexique… et même d’Ukraine et de Russie! « Et ce n’est pas la guerre dans la classe! Peu importe ce qui se passe dans leur pays d’origine, ici, tout le monde se respecte », assure-t-elle.

Carla Alessandra Rossignoli Agostini voit son parcours en francisation comme une façon de bien s’intégrer à la société québécoise. « C’est important pour tout le monde. Si on a choisi le Québec, c’est parce qu’on veut apprendre sa langue et faire partie de sa communauté », insiste-t-elle, bien qu’elle admette trouver certaines règles grammaticales difficiles à maîtriser. À la maison, elle parle encore en portugais avec sa petite famille, mais elle trouve important de pouvoir parler en français avec ses voisins ou les commerçants qu’elle visite. « Les gens sont très compréhensifs et me corrigent parfois sans méchanceté quand je prononce mal certains mots! Ils parlent parfois très vite, alors je dois leur demander de ralentir un peu, mais ça se passe très bien. »

Rosina Popazova ne manque pas de belles histoires avec les élèves qu’elle a vu passer au fil des années. « À la fin du parcours de francisation, c’est toujours émotif de les voir partir. En sortant, ce ne sont plus mes élèves, ce sont mes amis. »

Manque de ressources

Les belles histoires en francisation ne manquent pas, mais les défis demeurent bien présents, reconnaît Rosina Popazova, qui a vu ces dernières années les ressources diminuer de façon draconienne. « On n’a pas d’aide à la classe pour les élèves en difficulté. Il y a aussi trop de niveaux dans une même classe [allant dans son cas des niveaux 3 à 7 de francisation] et on a besoin de plus d’enseignants! Il y a cinq ans, on avait un budget pour deux sorties par mois, ce qui est important pour aider à tisser des liens, mais le budget a diminué et on est rendu avec 10 $ par élève seulement. »

« Je ne suis pas d’accord avec les discours qu’on entend sur les immigrants qui ne veulent pas apprendre le français. Pourquoi les ministres ne viennent-ils pas dans ma classe pour voir à quel point les immigrants veulent l’apprendre malgré les embûches? Certains de mes élèves travaillent aussi à temps plein et finissent à 2 h matin et sont quand même ici à 8 h 30 pour apprendre », insiste l’enseignante. Pour elle, l’État peut certainement en faire un peu plus pour aider ces nouveaux arrivants à s’intégrer à leur société d’accueil.

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