6 mai 2024 - 05:00
Une distinction à partager
Par: Vincent Guilbault
Vincent Guilbault

Vincent Guilbault

Ce que je vais vous dire ne va pas faire trop sourciller mes collègues journalistes; cette petite anecdote est parfois notre pain quotidien.

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J’ai commencé la semaine en me faisant rentrer dedans au téléphone par une personne derrière un projet que je vais taire ici, mais qui a déjà fait les manchettes. Elle m’en voulait d’en avoir parlé alors que le « timing » n’était pas le bon. En fait, on aurait voulu que le journal attende le feu vert pour parler du projet, au moment choisi par le promoteur.

J’avais beau expliquer que le projet devait passer par un changement de zonage et autres modifications réglementaires, et donc que tout était public, rien n’y faisait : j’avais gâché la surprise et j’étais un empêcheur de tourner en rond.

J’ai eu d’autres appels du genre cette semaine, une semaine un peu plus active en matière d’affrontements et d’accusations. Ça arrive.

C’est dans ces moments qu’on est heureux d’avoir quitté le confort du foyer en télétravail pour se retrouver avec les collègues au bureau. On se soutient, on partage les anecdotes de nos confrontations, de nos nuits à dormir d’un œil parce qu’on sait qu’un texte en manchette va faire réagir; parce qu’on sait qu’on va recevoir un coup de fil désagréable.

Des fois, ça nous brûle; parfois, ça peut nous nourrir, au contraire, comme cette semaine. Après chacun de ces appels, j’avais une foi renouvelée en mon métier. Un peu cliché, mais je sentais qu’en dérangeant, je faisais un peu plus œuvre utile qu’à l’habitude.

Mercredi, j’ai eu la surprise d’obtenir une troisième place aux Grands Prix des hebdos pour mon texte éditorial sur la Ville de Belœil qui a adopté une réserve financière de 20 M$ pour ses infrastructures de loisirs et sportives. Je critiquais le manque de transparence de la Ville dans la gestion du processus de signature de registre. Le texte n’a rien changé sur l’adoption du règlement, mais on me dit que la Ville a tenu compte de la grogne citoyenne et qu’elle adaptera ses méthodes. C’est donc déjà ça de gagné.

J’en profite pour souligner ici le travail de mes deux collègues journalistes, Olivier Dénommée et Denis Bélanger, sans qui je ne serais pas grand-chose. Je partage donc ce prix avec eux (et avec toute l’équipe, bien sûr). Si j’ai la chance de commenter l’actualité de la région chaque semaine, c’est parce que je peux d’abord m’appuyer sur les reportages de ces deux journalistes. Ce sont eux les vrais empêcheurs de tourner en rond, les gossants qui insistent pour avoir une entrevue ou un commentaire. Pour les belles et les moins belles histoires. Ce sont eux qui, cette semaine, dans nos pages, ont convaincu une victime d’une attaque de raconter son histoire en dévoilant son nom pour avoir plus d’impact, qui ont raconté l’histoire de cette immigrante qui fait tout en son pouvoir pour bien apprendre le français ou qui ont juste pris la peine d’écouter les opposants à un projet dans un parc.

On reçoit souvent le pot en pleine gueule. Lorsqu’on reçoit une petite fleur sous forme de reconnaissance, ça fait donc un petit velours. On se dit que malgré les embûches des dernières années, la job, elle, reste toujours pertinente.

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