5 mars 2020 - 07:30
Une experte suggère d’acheter le terrain de golf rapidement
Par: Sarah-Eve Charland

Danielle Pilette. Photo gracieuseté

L’experte en gestion municipale Danielle Pilette estime que la Ville de Belœil se retrouve devant un dilemme concernant le terrain du Club de golf pour lequel elle devra agir rapidement. La professeure rejette l’idée d’une réserve foncière et trouve ambiguë l’imposition d’un moratoire sur le changement de zonage.

Publicité
Activer le son

« On se retrouve devant un choix. Soit la Ville essaie d’acquérir tout de suite le terrain de golf en entier par entente de gré à gré, ou autrement, […] il faudra qu’un jour ou l’autre la Municipalité autorise un projet, au moins sur la parcelle concernée », observe-t-elle.

Danielle Pilette est professeure associée au Département de Stratégie, responsabilité sociale et environnementale à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (UQÀM).
Mme Pilette croit que la meilleure option est d’acquérir rapidement l’ensemble du terrain grâce à une entente de gré à gré avec les propriétaires du Club de golf. En regardant le profil financier de Belœil 2018, le plus récent, elle observe que le pourcentage d’excédent accumulé est particulièrement élevé, soit 26,15 % (11 M$), alors que la moyenne des municipalités du Québec est de 15,84 %.

Même si une bonne partie est déjà affectée, elle croit qu’il serait très réalisable de piger dans les surplus pour financer une partie de l’achat du terrain.

« Si la Ville achète le terrain de gré à gré, ça rendrait le terrain plus rare dans la municipalité. Ne serait-ce que cette rareté, ça ferait augmenter la valeur générale des [autres] terrains aussi. Ça coûterait quelque chose [à la Ville], mais à plus long terme, ça lui rapporterait quelque chose aussi. Le terrain de golf deviendrait non constructible et, ça aussi, ça participe à la rareté des terrains. Donc, ça fait un peu augmenter les prix de tous les autres terrains sans avoir à donner plus de services ailleurs. »

La valeur du terrain, selon l’évaluation municipale, est de 5,3 M$. Sans la chiffrer, le Club de golf estime que la valeur marchande du terrain est plus élevée.

« J’aurais tendance à le croire, note Mme Pilette. La valeur marchande serait plus élevée à la condition qu’ils n’enlèvent pas une parcelle et que [le terrain] reste intégral. […] Ce qui est recherché actuellement, ce sont les très grands terrains. On n’a plus de terrains disponibles dans la CMM pour faire des grands projets. Ce qui lui donne de la valeur, c’est le fait qu’il soit grand. Si on le subdivise, le total des subdivisions vaut moins cher. »

Une réserve foncière?

Mme Pilette croit que l’imposition d’une réserve foncière ne serait pas avantageuse pour Belœil. Une réserve foncière consiste à réserver un terrain ou un bâtiment à des fins publiques pendant deux ans afin d’interdire des investissements de la part des propriétaires. L’immeuble peut être exproprié ou la réserve abandonnée à la date d’expiration. La Ville pourrait devoir verser une indemnité à la fin de la réserve foncière d’après les dommages subis et causés par cette imposition.

« Si on fait une réserve foncière, ça fait en sorte que la Municipalité a le projet d’acquérir le terrain par expropriation. Avant d’acquérir par expropriation, il faudrait d’abord que le projet [qui verra le jour sur le terrain exproprié] apparaisse à son plan d’urbanisme. […] C’est moins avantageux pour la Municipalité parce que le prix du terrain va augmenter. Ça ne gèle pas le prix du terrain. La Ville ne contrôle pas le prix qu’elle paiera plus tard. »

Un moratoire?

En principe de zonage municipal, la Municipalité doit permettre au moins un usage à un terrain si elle n’en est pas propriétaire. La Ville a plutôt statué sur un moratoire concernant tout changement de zonage en attendant la tenue de consultations publiques. Le zonage du terrain du Club de golf est récréatif pour un usage golf et espace vert seulement.

« Si le golf vend, la Municipalité ne pourra pas maintenir [un moratoire]. Elle ne peut pas dire que le nouvel acquéreur va demeurer dans le zonage golf et qu’il n’aura pas de permis. […] On va trop loin. Les municipalités ont le pouvoir de discriminer des usages. Il faut qu’un propriétaire privé puisse faire quelque chose à moins qu’il y ait des contraintes environnementales particulières. […] Si ça dure longtemps, l’acheteur va aller en cour et va obliger la Municipalité à autoriser quelque chose. Ne pas faire de changement de zonage, je ne pense pas que ça tiendrait devant les tribunaux. Si une parcelle est vendue, dans le secteur privé, l’acheteur n’offrira pas un nouveau terrain de golf sur un morceau de terrain de golf. Le pouvoir de la Municipalité n’est pas de tout bloquer, en tout cas pas sur le long terme », soutient la professeure.

Belœil pourrait adopter une résolution de contrôle intérimaire, qui limite le développement le temps d’évaluer la situation selon l’experte. Mais cette option est écartée par la Ville.

À lire aussi:

– « Le Club de golf Belœil n’est pas à vendre »

 

image