Depuis peu, l’installation par un expert certifié d’un système de protection, incluant un tuyau passif complet traversant le bâtiment afin d’évacuer le radon – un gaz radioactif, invisible, inodore et insipide – par le toit, est obligatoire pour toutes les nouvelles constructions à Belœil afin de limiter la concentration en radon, souvent plus élevée dans les constructions récentes. Selon une étude menée par Santé Canada en 2022, près de 23 % des habitations sur le territoire ont une concentration de radon supérieure à la limite canadienne recommandée de 200 becquerels par mètre cube (Bq/m3).
Le système passif, dit « de niveau 2 », réduit d’environ 50 % la concentration de radon dans l’air, réduisant ainsi le risque de développer un cancer du poumon attribuable à ce gaz. Mathieu Brossard, spécialiste en rayonnement pour la région du Québec chez Santé Canada, précise que des résultats récents permettent de croire que la réduction est encore plus élevée que ce pourcentage, confirmant l’efficacité d’une telle mesure de mitigation du radon. Santé Canada a été consulté dans le développement de la nouvelle réglementation belœilloise, qui se colle donc au dernier standard établi en 2019 par l’Office des normes générales du Canada.
« Les codes de construction vont recommander un minimum acceptable, mais le standard établit les meilleures pratiques, avec différents paliers de recommandations, de meilleurs matériaux à utiliser, de meilleures façons d’installer les systèmes. C’est ce que fait la Ville de Belœil avec ce règlement, qui offre un bon niveau de protection qui va réduire avec le temps l’exposition des occupants dans ces futurs bâtiments », poursuit M. Brossard. Il rappelle qu’il est impossible de connaître la concentration en radon d’une nouvelle construction avant que les occupants y emménagent. « Il est important de mesurer le radon pendant la première période de chauffage. Si le niveau de radon est encore trop élevé malgré les mesures préventives, il sera alors possible d’activer le système. »
Une garantie
Le règlement comporte un autre avantage non négligeable pour les propriétaires faisant face à une concentration élevée en radon. « Le plan de garantie pour les maisons neuves reconnaît le radon comme un vice de construction, mais seulement s’il y a un règlement municipal en place à cet effet », note Mathieu Brossard. Belœil n’est pas la seule Municipalité au Québec à avoir entrepris des démarches pour limiter les risques liés au radon, mais le spécialiste estime qu’elle contribuera à en inspirer d’autres. S’il reconnaît que des normes varient beaucoup d’une Municipalité à l’autre, ce qui permettrait par exemple de se fier au standard de 2005 qui tolérait jusqu’à 800 Bq/m3, il ignore si les paliers de gouvernement supérieurs pourraient intervenir pour rehausser les normes minimales. « Ça reste une bonne question. Nous, on émet des directives et des recommandations, mais ce sont ensuite les gouvernements municipaux, provinciaux et fédéral qui peuvent les mettre en force. »
De son côté, le Dr Jean-Claude Dessau, porte-parole pour le radon au ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) du Québec, a chaleureusement félicité les élus de Belœil pour leur proactivité dans ce dossier. « Belœil devient ainsi un chef de file dans la lutte au cancer du poumon causé par le radon », a-t-il écrit dans un courriel, dont L’ŒIL a obtenu copie. Il considère aussi qu’une telle mesure va contribuer à protéger les personnes qui seraient exposées quotidiennement au radon, « non seulement des personnes les plus exposées, au-dessus de 200 Bq/m3, mais aussi de toutes celles qui auraient été exposées en dessous de la ligne directrice ». Réalisée à l’échelle du Québec, cette mesure finirait par faire diminuer le risque de cancer du poumon de l’ensemble de la population.
Le Dr Dessau confirme que Belœil, à l’instar de plus en plus de municipalités au Québec, se démarque positivement dans sa lutte contre le radon. Quant au sujet des normes nationales, il note qu’en 2022, la Régie du bâtiment du Québec (RBQ) a émis un règlement modifiant le Code de construction du Québec (CCQ) pour l’harmoniser avec le Code national du bâtiment (CNB). Ce règlement fait en sorte que les mesures de protection contre l’infiltration du radon pour les maisons neuves sont exigées partout au Québec et non seulement dans les zones reconnues à risque. Toutefois, ce règlement ne s’applique qu’aux bâtiments de plus de 2 étages ou de plus de 8 logements, ce qui exclut les maisons unifamiliales, laissant donc le soin aux municipalités d’agir de façon indépendante sur ce plan. « Le MSSS collabore avec la RBQ afin d’identifier les pistes d’action supplémentaires », dit-il.
Belœil impliquée contre le radon
La mise en application de la nouvelle réglementation n’est que la dernière action entreprise par la Ville de Belœil dans le dossier du radon. Rappelons que, depuis 2020, la Ville reconnaît officiellement l’importance de sensibiliser la population à la problématique environnementale du radon et qu’elle a posé en 2021 trois actions dans ce dossier, soit la mise en place d’une subvention pour l’achat d’un dosimètre servant à mesure la concentration de radon dans une résidence, le dépôt d’une demande officielle au gouvernement du Québec de modifier le Code de construction afin de rendre obligatoire l’installation d’un système de protection contre le radon et l’engagement dans la campagne provinciale Villes et municipalités contre le radon de l’Association pulmonaire du Québec. L’année suivante, Belœil a même été la ville hôte de la campagne provinciale annuelle Villes et municipalités contre le radon, ce qui lui a permis de remettre gratuitement 100 trousses de détection du radon à ses citoyens et d’offrir une formation virtuelle.