8 novembre 2023 - 07:00
Une responsabilité collective
Par: Denis Bélanger

Je vous recommande fortement de lire l’essai Hors jeu de Florence-Agathe Dubé-Moreau (voir texte en page 34) qui pose un regard féministe sur le sport. Il est très intéressant et déconstruit bien des préjugés sur plusieurs groupes de personnes. Elle note aussi le fait que le sport féminin génère une très faible couverture médiatique comparativement aux hommes. Je profite de cette tribune pour élaborer le sujet. Le problème ne se situe pas seulement au niveau de l’offre, mais aussi au niveau de la demande.

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J’entends encore dans mon quotidien trop de gens rechigner à l’idée de s’asseoir devant la télé pour regarder du sport féminin. Il y a environ dix ans, une querelle a failli éclater au boulot. Un collègue estimait que le Canada n’était pas très bon aux Olympiques d’hiver de Sotchi, car il dépendait de ses athlètes féminines pour gagner des médailles. Ce collègue est pourtant plus jeune que moi; j’avais 32 ans à l’époque.

Il y a un an et demi, à l’approche de la Coupe du monde masculine de soccer, un proche et moi discutions de la participation historique du Canada à cet événement. Je constatais à quel point le pays s’était amélioré sur la scène internationale au ballon rond. Je lui rappelais entre autres la conquête de la médaille d’or en soccer féminin des Canadiennes aux Jeux de Tokyo en 2021 et lui soulignais à quel point j’étais fier de cet exploit. Voici ce que m’a sèchement répondu mon proche. « Excuse-moi, ça va peut-être faire macho, mais le sport féminin ne m’intéresse pas. »

Une bonne connaissance à moi partageait ses doléances concernant son propre père. En effet, son père à lui assiste à toutes les pratiques du sport collectif de son garçon. Notons qu’à l’une des deux soirées de pratique, sa fille fait de la gymnastique. « Mon père refuse de manquer une pratique de son petit-fils pour aller voir sa petite fille », m’a-t-il répondu. « Il veut attendre la fin de saison avant d’aller voir la gymnastique. Ça me désole, il ne veut pas aller encourager sa petite fille, car il trouve ça plate la gymnastique. »

Un amateur de lutte professionnelle de mon entourage visionne en accéléré les matchs de femmes, car il trouve cela moins intéressant. Les exemples sont nombreux. Il y a encore beaucoup de travail à faire pour faire changer les mentalités, et c’est peut-être un peu à chacun de nous convaincre les autres de donner une chance au sport féminin.

J’aurais pu moi-même forcer la note l’an dernier pour aller voir l’équipe de hockey féminine de la Force avec des membres de ma famille. J’aurais pu inviter ma famille à venir écouter chez moi une partie du Canada de la Coupe du monde féminine. J’aurais pu essayer de regarder la finale cet été. J’ai toutefois décroché après l’élimination du Canada. Pourtant, j’ai écouté la Coupe du monde masculine jusqu’en finale, même sans la participation de l’équipe canadienne.

C’est en présentant suffisamment de sport féminin que les plus incrédules vont découvrir que c’est un bon produit. Et comme la Coupe féminine a enregistré des sommets en cotes d’écoute cet été, j’entretien un peu d’espoir pour la suite des choses.

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