21 février 2024 - 07:00
Souvenirs de la Vallée sous l’eau
Par: Vincent Guilbault
Vincent Guilbault

Vincent Guilbault

En présentant les craintes du chercheur Philippe Gachon sur la hausse des fréquences des inondations et de leurs effets dévastateurs, notre but n’est pas de faire peur. Mais il est difficile de ne pas se sentir légèrement inquiets.

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En entrevue, le professeur de géographie craint la destruction de milieux humides pour un paquet de raisons écologiques, allant des impacts sur la nidification de certaines espèces à la destruction d’îlots de fraîcheur. Mais c’est le risque d’inondations qui est l’inquiétude qui me marque le plus. D’abord, parce qu’il s’agit de la spécialité de cet Otterburnois; et aussi parce que comme lui, j’ai eu l’occasion de voir concrètement les effets des inondations dans la Vallée.

Petit aparté. Les changements climatiques, même s’ils sont bien documentés, laissent parfois l’impression d’être un phénomène abstrait, lointain. Mais depuis l’épisode des feux de forêt, on se doit d’avouer que leurs impacts sont bien réels. Et pour la rivière, on peut le constater quotidiennement. Lundi, je circulais en voiture avec mes enfants et je leur disais qu’il n’y pas pas si longtemps, je pouvais rouler en voiture sur le pont de glace situé sur la rivière entre Saint-Denis et Saint-Antoine-sur-Richelieu. Mais cette année, la rivière n’a toujours pas gelé et nous entamons la fin du mois de février. Les changements du climat causent une incertitude de nos saisons. Le professeur Gachon le résume ainsi : le passé n’est plus garant de l’avenir en ce qui a trait à la prévisibilité du climat.

Revenons aux inondations. En mai 2011, j’ai parcouru la région avec le photographe Yann Canno pour documenter les impacts du débordement de la rivière. Nous avons visité de nombreux sous-sols inondés, des rues complètement ensevelies, des terrasses de restaurants englouties par le Richelieu. Je me souviens des soirées d’informations pour les sinistrés auxquelles j’ai assisté, la présence de l’armée, l’installation de blocs de béton et de sacs de sable dans les rues. Ma voiture presque enlisée dans l’eau de la rue Richelieu inondée, parce que nous avions défié les interdictions de circulation pour avoir de bonnes photos. C’était surréel!

Les riverains seront sûrement d’accord avec moi : personne ne veut revivre cette situation.

C’est pourquoi les propos de M. Gachon m’inquiètent. La destruction de milieux humides, c’est plutôt abstrait pour moi. Mais dans ses mots et ses explications, tout a un peu plus de sens. On envisage carrément de remblayer les éponges de la région, de détruire une barrière contre la crue des eaux.

Je sais bien que le ministre Fitzgibbon n’aime pas trop qu’on parle en mal de son investissement économique, comme il le rappelle dans sa lettre ouverte publiée dans La Presse. Mais ça fait quand même un peu peur de lire tout ce que les experts soulèvent concernant la destruction de cet écosystème. Et je comprends plus que jamais la nécessité d’un BAPE. Car même si le ministère de l’Environnement et des Changements climatiques est aussi rigoureux qu’on le dit, il ne nous fournira pas une vision d’ensemble comme le ferait un BAPE.

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